Nous vivons une époque passionnante : l’intelligence artificielle (IA) n’appartient plus à la science-fiction, mais à la réalité. Avec l’émergence d’applications concrètes, le marché international de l’IA est en pleine croissance. Selon les prévisions, il devrait représenter 7,35 milliards USD d’ici la fin de l’année.
Pour le moment, le machine learning (ML) est surtout perçu comme un moyen d’analyser des ensembles de données très volumineux et d’optimiser les tâches récurrentes, alors qu’en fait, cette technologie pourrait avoir un impact énorme dans certains secteurs, notamment celui de la vente au détail et de l’e-commerce.
Early Metrics a noté des centaines de startups européennes dans ce domaine d’activité, et possède une vaste base de données qualitatives et quantitatives sur les jeunes pousses. Voici les 5 tendances clés que nous avons identifiées comme ayant une influence sur l’adoption de l’IA (et de ses innovations) dans le secteur de la vente au détail.
Les emplois logistiques sont de plus en plus menacés par les robots
Actuellement, l’IA est parfaitement positionnée pour préempter des postes faiblement qualifiés et intermédiaires dans les services logistiques. En effet, il s’agit généralement de tâches hautement répétitives et prévisibles qui pourraient facilement être automatisées et effectuées par des robots. Le géant chinois de l’e-commerce Alibaba est l’un des premiers à avoir franchi le pas, et son entrepôt de Huiyang est désormais géré davantage par des robots que par des humains. Les marchandises sont transportées à travers l’entrepôt par des machines, ce qui réduit la charge de travail humaine de 70 %. Bien entendu, cette évolution soulève de sérieuses inquiétudes quant à la sécurité de l’emploi : un rapport de PwC estime que l’automatisation pourrait faire disparaître 44 % des emplois du secteur de la vente au détail d’ici 2030.
L’IA peut nettement améliorer la détection des fraudes
L’IA se montre particulièrement efficace pour identifier des schémas, et cette capacité s’avère très utile pour détecter les fraudes sur les sites d’e-commerce. En effet, l’application du ML à un algorithme lui permet d’entraîner ses modèles et de se mettre à jour en analysant des données, ce qui le rend plus performant pour détecter les fraudes au fil du temps. En outre, les algorithmes de machine learning sont conçus pour réagir et s’adapter bien plus rapidement qu’un humain ne le pourra jamais. Le cas d’Ocado illustre bien l’efficacité d’une telle mise en œuvre. Cette épicerie en ligne a développé son propre système de détection des fraudes en combinant un algorithme de son cru au logiciel open source Tensorflow, le tout s’exécutant dans Google Cloud. D’après l’entreprise, son système ML renvoie des résultats 15 fois plus précis. Autre cas d’utilisation notable : la reconnaissance faciale dans la vidéo pour éviter les vols à l’étalage.
Les détaillants adoptent rapidement les technologies automatisées de service client et de marketing ciblé
De nombreux marchands testent également les technologies de service client et de marketing ciblé assistées par l’IA. À nouveau, cela est rendu possible par la capacité des systèmes IA à analyser de grands ensembles de données client, et à personnaliser des messages marketing (recommandation de cadeau, par exemple) de manière pertinente et opportune. D’autre part, certains chatbots sont de plus en plus efficaces quand il s’agit de répondre à des questions récurrentes des clients, ce qui fait gagner un temps précieux aux employés. Le traitement du langage naturel est encore loin d’être parfait, mais les assistants numériques s’améliorent, et parviennent de plus en plus souvent à contextualiser les demandes et à répondre comme un être humain le ferait.
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Les détaillants ont conduit leurs clients dans la « vallée de l’étrange »
Comme mentionné au point précédent, les assistants numériques arrivent plutôt bien à se faire passer pour des humains et parviennent presque à interagir comme de vraies personnes. Mais ce « presque » a un impact conséquent sur la satisfaction des clients, et donc sur l’adoption de masse de ces assistants. Quand quelque chose nous fait tiquer lors d’un chat avec un agent du service client et que l’on réalise qu’il ne s’agit pas d’une personne à l’autre bout, mais d’un robot, nous ressentons généralement un malaise et devenons bien moins tolérants aux erreurs. C’est ce qu’on appelle l’effet de la « vallée de l’étrange » (« uncanny valley » en anglais). En voulant innover rapidement, certains détaillants ont conduit leurs clients tout droit dans cette vallée. Ceci a été parfaitement illustré plus tôt cette année par l’échec de Fabio, le gentil shopbot écossais qui a été viré au bout d’une semaine parce que les clients le trouvaient « flippant ». Le seul moyen de sortir de ce gouffre, c’est soit d’arrêter d’anthropomorphiser l’IA, soit de rendre son comportement si efficace qu’elle pourrait réussir le test de Turing.
Découvrez pourquoi l’expérience Fabio a mal tourné :
La réglementation sur la protection des données et les inquiétudes des clients en la matière sont des obstacles majeurs à l’adoption de l’IA
Le plus grand obstacle à l’adoption de l’IA dans le secteur de la vente au détail demeure celui de la réglementation sur la protection des données. L’entrée en vigueur du RGPD ne vous aura sûrement pas échappé : à ce jour toutefois, la question du traitement des données par les algorithmes de machine learning reste floue. D’autre part, comme le récent scandale Cambridge Analytica l’a montré, les consommateurs hésitent beaucoup à autoriser les entreprises à utiliser leurs données personnelles. Cela est susceptible de ralentir l’adoption de nouvelles solutions par les détaillants, de plus en plus réticents à tester des technologies qui pourraient faire fuir leurs clients.
On peut donc dire que même si l’IA n’est pas encore véritablement « intelligente », elle présente des applications intéressantes dans le secteur de la vente au détail et de l’e-commerce, notamment pour l’optimisation de la logistique de stockage. Face au grand volume de données générées par les clients, l’intervention de l’IA apparaît de plus en plus pertinente dans les domaines du service client et du marketing ciblé. Néanmoins, des obstacles majeurs empêchent son adoption à grande échelle, comme la réglementation sur la protection des données et le sentiment étrange que ressentent les clients face aux systèmes humanoïdes.
Early Metrics analyse en permanence les évolutions dans ce domaine grâce à ses relations étroites avec des entreprises innovantes et des détaillants traditionnels. Nous allons continuer à surveiller les nouvelles avancées de l’IA… tout en gardant un œil sur les robots flippants.
English version available here :
Research and Content Producer d’Early Metrics, Anaïs Masetti s’intéresse particulièrement aux sujets Fintech, eHealth et IA.