Marketing 2025 : les mutations d’un métier en quête de sens, de tech et d’humain

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Le 27 mars 2025, Bpifrance Le Hub a réuni quatre professionnels du marketing pour décrypter les transformations d’un secteur en constante évolution. Retour sur cet événement.

Evénement BPI France Le HUB évolution des métiers du Marketing

Le 27 mars 2025, Bpifrance Le Hub a réuni quatre professionnels du marketing pour décrypter les transformations d’un secteur en constante évolution. Au cœur des échanges : intelligence artificielle, spécialisation des compétences, mutation des rôles, guerre des talents et brouillage des titres. Une photographie sans détour d’un métier en train de se redéfinir.

Autour de la table, des profils complémentaires :

– Domitille de Saint-Exupéry, CMO de Lemlist, plateforme de prospection B2B qui mise sur la personnalisation à grande échelle,
– Mégane Gateau, CMO chez Figures, spécialiste de la gestion de la rémunération
Jordan Chenevier-Truchet, cofondateur de l’agence Marketing & Growth Bulldozer.
– Et Jolhane Leite, cofondateur d’UnlockM, une plateforme de formation et communauté pour responsable et directeur-ice marketing.

De gauche à droite, Jordan Chenevier-Truchet (Bulldozer), Jolhane Leite (UnlockM), Mégane Gateau (Figures), Domitille de Saint-Exupéry (Lemlist)

Un secteur en transition permanente

 

Fini le marketing généraliste ! En l’espace de quelques années, les entreprises ont vu émerger une galaxie de nouveaux métiers aux intitulés parfois flous mais aux expertises bien réelles : marketing ops, growth engineer, product marketing, content strategist… Une spécialisation alimentée par deux dynamiques majeures : l’explosion des canaux et le besoin d’autonomie vis-à-vis des équipes techniques.

Cette montée en compétence touche toutes les tailles d’organisations, y compris les PME, désormais en quête de profils pointus. Les recruteurs, eux, réclament des expertises ciblées. Le simple intitulé “marketing manager” ne suffit plus à résumer un rôle.

Il y a deux grandes catégories de nouveaux rôles : les spécialistes métier – par canal ou par levier – et les rôles d’interface comme le product marketing. On cherche à être plus autonomes vis-à-vis des équipes tech.” – Domitille de Saint-Exupéry

 

L’IA, catalyseur de transformation

 

L’intelligence artificielle s’est imposée dans le quotidien des équipes marketing, bien au-delà du simple effet de mode. Utilisée pour produire des briefs, résumer des webinaires, générer des contenus ou automatiser des campagnes, elle modifie en profondeur les pratiques.

Certaines entreprises vont plus loin en intégrant l’IA dans leur stratégie de personal branding ou de prospection automatisée. Les agents conversationnels capables d’imiter un style rédactionnel spécifique ou de produire des posts LinkedIn calibrés sont devenus une réalité opérationnelle.

Mais l’IA ne se limite pas à la génération de texte : elle s’avère aussi précieuse pour l’analyse et la prédiction. Générer des requêtes SQL, scorer des leads ou créer des modèles de segmentation devient accessible sans être développeur. Encore faut-il encadrer son usage : structuration des projets, partage de prompts, outils premium… tout est pensé pour garantir des résultats de qualité, notamment chez les profils les moins expérimentés.

Je ne code plus : je décris mon besoin à l’IA et elle me sort des requêtes SQL de meilleure qualité que les miennes. C’est là que l’IA a le plus changé mon quotidien.” – Jordan Chenevier-Truchet

Jordan Chenevier-Truchet (Bulldozer)

Prospection et contenu : l’IA comme levier, pas comme raccourci

 

Dans les usages les plus avancés, l’IA détecte les bons signaux, propose le bon message, au bon moment. La promesse d’une prospection plus fine et moins intrusive. Mais tout n’est pas encore mature, notamment sur les appels à froid (“cold calls”) générés automatiquement, où l’effet “wow” ne compense pas toujours le manque de naturel.

Même prudence sur le contenu SEO, parfois (souvent) jugé trop standardisé. Si l’IA peut booster la productivité, elle ne remplace pas l’intelligence humaine. L’approche qui fonctionne ? Mettre la technologie au service de la qualité, pas de la quantité.

 

Une valorisation encore inégale des métiers

 

L’étude menée par Figures dresse un constat clair : les écarts de salaires dans le marketing restent significatifs. Un CMO en série B peut atteindre 170k€/an, tandis qu’un junior commence souvent autour de 40k€. Le différentiel entre les métiers stratégiques et les fonctions contenu ou communication reste marqué, avec des écarts genrés persistants : à poste égal, les hommes sont encore payés en moyenne 8 % de plus.

Pourtant, le contenu s’impose comme un levier d’acquisition majeur dans les organisations les plus performantes. Certaines équipes génèrent jusqu’à 80 % de leurs leads grâce à la marque et aux contenus produits — loin devant les campagnes payantes. Recruter de bons profils en content est devenu plus difficile que sur des postes d’acquisition.

La perception évolue : le marketing n’est plus un centre de coût, mais un levier de revenu. Cette bascule vers un pilotage par la performance ouvre la voie à une meilleure reconnaissance du rôle.

On a encore 8 % d’écart de salaire à poste égal entre hommes et femmes, et les métiers de contenu, souvent féminins, sont moins valorisés. Il faut des grilles salariales plus justes, sinon on perpétue les inégalités.” – Mégane Gateau

Mégane Gateau (Figures)

Micro-influence et creator economy : nouveaux codes, nouveaux formats

 

L’époque des influenceurs stars touche à sa fin. Les entreprises cherchent désormais des voix crédibles, engagées, capables de co-construire des récits plutôt que de prêter leur image. Exit les partenariats “one-shot” : place à des collaborations sur le long terme, ancrées dans des communautés, newsletters ou événements ciblés.

Cette approche “creator economy” brouille aussi les lignes entre B2C et B2B. Les stratégies qui fonctionnaient dans l’un s’exportent dans l’autre. L’influence n’est plus une question d’audience, mais de résonance.

De gauche à droite, Jordan Chenevier-Truchet (Bulldozer), Jolhane Leite (UnlockM), Mégane Gateau (Figures), Domitille de Saint-Exupéry (Lemlist)

Guerre des titres : derrière le flou, des enjeux de reconnaissance

 

CMO, VP, Head of… Les intitulés de poste ne reflètent pas toujours la réalité du terrain. Un vrai CMO pilote la stratégie marketing de bout en bout, sans supérieur hiérarchique sur ce périmètre. Pourtant, le terme est souvent utilisé à tort, générant des écarts de salaires et des malentendus côté recruteurs.

Le marché joue aussi un rôle ambigu : certains freelances adaptent leur titre à l’impact commercial qu’il peut générer, sans que le rôle évolue en substance. Résultat : une confusion généralisée, et un besoin urgent de clarifier les périmètres plus que les étiquettes.

J’ai été ‘CMO de moi-même’ dans une petite boîte, sans équipe ni stratégie globale. Aujourd’hui, je siège au COMEX. Le titre peut être le même, mais le périmètre n’a rien à voir.” – Domitille de Saint-Exupéry

Domitille de Saint-Exupéry (Lemlist)

5 choses à retenir de l’événement :

 

L’IA n’est plus un gadget : elle impacte tous les niveaux — contenu, prospection, scoring, analyse — mais doit être structurée pour rester utile.
Les compétences se spécialisent : fini le profil “couteau suisse”, place aux experts (growth, data, content…).
Le contenu est un actif stratégique : trop souvent sous-valorisé, il devient central dans les stratégies d’acquisition.
Les titres ne font pas le poste : ce qui compte, c’est le périmètre, la stratégie, et le lien au business.
Le marketing devient un levier de croissance : sa contribution au revenu devient mesurable et reconnue.

En conclusion

 

Le marketing en 2025 repose sur un équilibre fin : entre automatisation et relationnel, expertise technique et narration authentique, optimisation et impact. Si les outils évoluent vite, la vraie différence se joue sur la capacité des équipes à les intégrer dans une stratégie cohérente, humaine et ambitieuse.

Jolhane Leite (UnlockM)

Il y a deux polarités dans le marketing aujourd’hui : tech, IA, data d’un côté ; humain, relationnel de l’autre. L’enjeu, c’est de trouver l’équilibre.” – Jolhane Leite

 

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