Fonds étrangers de capital risque dans la santé : le radar Bpifrance Le Hub

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Avec un volume de transactions toujours soutenu, on peut se réjouir du dynamisme du secteur du capital risque en France, ce d’autant que l’on constate que les fonds d’investissements étrangers sont présents sur de nombreux tours de table, une preuve de plus s’il en fallait de l’attractivité de l’innovation en France. En même temps, il est souvent compliqué pour une jeune pousse Française qui a pour ambition de lever des fonds avec des acteurs internationaux, de naviguer parmi la multitude de fonds d’investissements étrangers spécialisés dans la santé. Bpifrance Le Hub propose dans cet article 3 radars qui scrutent les fonds étrangers actifs dans l’hexagone et offre ainsi une première lecture du paysage VC accessible en dehors de nos frontières.

 

Photo d’illustration par Chris Lawton via Unsplash

 

Besoin capitalistique fort des sociétés en Santé

Le secteur de la santé est un secteur à fort besoin capitalistique. Les cycles de développement très longs, notamment en Biotech et Medtech nécessitent de mobiliser beaucoup de capital. Les sociétés de E-santé, même si elles profitent de cycles de développement plus courts et ont vocation à générer des revenus plus rapidement, doivent souvent également valider cliniquement leurs solutions et donc mobiliser des capitaux pour passer ces étapes.

 

Dynamisme des fonds d’investissements Français

L’année 2019 a confirmé la montée en puissance des fonds français de la place avec de nombreuses prises de participation et des tailles de tour de table qui augmentent à l’image des tendances constatées outre-Atlantique. Les sociétés françaises peuvent désormais compter sur de nombreux fonds privés spécialisés basés à Paris : Advent, Andera Partners, Karista (ex-Cap Decisif), Innobio (Bpifrance), Sofimac, Sofinnova Partners, Seventure Partners pour n’en citer que quelques-uns…

 

Bpifrance, via son activité fonds de fonds, participe directement à renforcer les positions de ces fonds et à créer un écosystème local d’investisseurs privés expérimentés capables de soutenir en capital l’émergence et le développement des startups françaises. Ces fonds d’investissements privés, dont certains sont crossover et capables d’intervenir sur toute la chaine de valeur, deviennent de véritables alternatives à une IPO précoce sur Euronext.

 

Des startups françaises dépendantes des capitaux étrangers

Malgré la force de frappe croissante des fonds d’investissements privés français, la recherche de financement reste une des préoccupations principales des sociétés HealthTech françaises qui très souvent doivent se tourner vers l’international pour compléter leurs tours de table. C’est pourquoi, en 2019, un tiers des entreprises HealthTech Françaises (cotées et non cotées) accueillent un ou plusieurs investisseurs étrangers à leur capital (Source : Panorama 2019 France Biotech). Aujourd’hui la France est d’ailleurs le deuxième pays européen attirant le plus de capitaux dans le secteur de la Healthtech après le Royaume-Uni.

A titre d’illustration, 9 des 10 plus grosses opérations en Healthtech en France en 2019 comptaient des fonds étrangers dans le tour de table : Doctolib, HiFiBio, Alizé pharma 3, Bioserenity, Imcheck Therapeutics, Dental Monitoring, Tissium, Inotrem, DNA script, HighLife.

Ces tendances montrent à la fois que l’écosystème français de startup est attractif pour les capitaux étrangers mais également qu’il est intéressant stratégiquement sinon indispensable pour ces sociétés d’aller se financer à l’étranger.

Radar des investisseurs étrangers

 

Dans le cadre de l’activité de veille et de soutien à l’écosystème français de sociétés innovantes, l’équipe HealthTech de Bpifrance Le Hub a analysé les transactions de sociétés HealthTech réalisées les 5 dernières années (2015-2019), en s’intéressant aux fonds d’investissements présents sur les opérations rendues publiques. Pour une société HealthTech française, la multitude de fonds d’investissement étrangers peut rendre la préparation de la levée de fond extrêmement fastidieuse. Le manque de lisibilité de l’environnement VC mais aussi le manque de connaissance ou de transparence sur les thèses d’investissement de chaque fonds fait qu’un roadshow investisseur à l’étranger peut se transformer en véritable parcours du combattant !

 

Afin d’éclaircir le paysage VC à l’étranger, Bpifrance Le Hub publie trois « radars » sectoriels (Biotech, Medtech, E-santé) des investisseurs étrangers présents sur des tours de table dans des sociétés HealthTech ces 5 dernières années. Pour réaliser ce travail, ce sont plus de 450 transactions réalisées par ~300 sociétés HealthTech françaises qui ont été passées au crible. Les fonds d’investissements ayant déjà réalisé des opérations dans l’hexagone, ont de forte chance d’avoir des thèses d’investissements compatibles avec de nouveaux investissements sur le territoire et seront des cibles de choix pour des sociétés françaises en recherche de capitaux à l’international.

 

Il est important de noter que les transactions dans des sociétés privées non cotées ne sont pas toujours rendues publiques et que par conséquent ce travail ne capture pas nécessairement la totalité des sociétés d’investissement qui ont eu une activité récente sur le territoire. En revanche, la taille de l’échantillon permet d’assurer que ce radar de l’investissement étranger reste représentatif de l’activité sur l’hexagone.

 

Parmi les fonds les plus actifs en nombre de deals, on retrouve notamment le fonds israélien Pontifax en Biotech, le fonds néerlandais LSP ou encore le fonds américain SOSV.

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PONTIFAX – L’Israélien

Pontifax ressort comme le fonds étranger le plus actif sur des deals Biotech en France. Fondé en 2004 par l’ex-CEO de Teva Pharmaceuticals, Eli Hurvitz, le fonds israélien a investi depuis 2015 dans au moins 6 biotech Françaises.  Dans leurs opérations les plus récentes en France, on retrouve la société Alizé pharma ou encore la biotech Dynacure.

Plus globalement, Pontifax affiche un portefeuille de sociétés principalement biotech, et en moindre mesure medtech, et cherche à investir dans des technologies à toutes les étapes du développement (seed à mid stage).

 

Life Science Partners – L’Européen

Basé à Amsterdam, Life Science Partners (LSP) est un acteur de premier plan parmi les fonds d’investissement européen dans le secteur de la santé. LSP a annoncé cette année avoir achevé la levée de son fonds LP6 pour 600M$ avec pour objectif d’investir dans 15 à 18 sociétés Healthtech, principalement européennes. Ce fonds vient compléter la force de frappe de la société en capital-risque qui compte deux autres véhicules : LSP HEF 2 & LFP public et couvre ainsi toutes les catégories de sociétés en santé (biotech, medtech, diagnostics, santé numérique) et également les sociétés cotées.

On retrouve, parmi les investissements récents du fonds, trois des plus grosses levées Françaises de 2019 : DNA Script, Alizé Pharma 3 et Imcheck Therapeutics.

 

SOSV – L’Américain

SOSV est l’un des fonds d’investissement les plus actifs aux Etats-Unis mais n’est pas un fonds de capital-risque traditionnel car il investit dans des accélérateurs comme IndieBio ou HAX. Il s’illustre également par le nombre de prises de participation au capital dans des startups medtech & medtech digitales françaises. On pourra citer parmi les prises de participation récentes, les startups Feetme ou encore la startup Japet Medical.

 

Du fait de son modèle particulier, SOSV est donc plutôt orienté sur l’accompagnement à la création d’entreprise et l’investissement seed. A titre d’exemple, Indie Bio, l’accélérateur de SOSV dédiée au Biotech offre $250k aux sociétés qui intègrent le programme d’accélération et propose des espaces de co-working et des laboratoires pour les sociétés nouvellement crées.

Les fonds Bpifrance : moteurs de l’attractivité française

Pour un investisseur étranger, avoir un investisseur local fort et de confiance fait partie des éléments de décision pour participer à un tour de table. Les différents fonds de Bpifrance et les fonds d’investissements privés financés par Bpifrance jouent ce rôle de partenaire de confiance dans les tours de table et participent à l’attractivité des fonds étrangers.

 

Au sein de Bpifrance, le fond Innobio lancé en 2009 est dédié aux entreprises du secteur de la santé et a un modèle unique dans la maison. Détenu à 51% par des actionnaires privés du secteur et à 49% par Bpifrance, il permet d’aligner les décisions d’investissement avec les stratégies des acteurs privés. Cet alignement est indispensable car ce sont ces mêmes acteurs qui généralement viennent prendre le relais dans les phases finales de développement cliniques. InnoBio 2, construit sur le même modèle que son prédécesseur, prend désormais le relais. Doté aujourd’hui de 143 millions d’euros, il a pour ambition de consolider la position de la France comme un pays de premier plan pour l’innovation en sciences de la vie. L’objectif du fonds est d’être capable d’apporter des financements sur des tours de table importants comme ceux observés outre-Atlantique et de permettre de continuer à faire la course en tête d’une compétition qui est désormais mondiale.

 

L’innovation numérique qui joue un rôle croissant dans le secteur de la santé a également un véhicule et une équipe dédiée à ces sujets au sein de Bpifrance : le fonds Patient Autonome. Le fonds lancé en 2017, dispose d’un capital de 50 millions d’euros et à l’image du fonds Innobio, il ouvrira son capital à des souscripteurs privés en 2021 et aura ainsi une force de frappe renforcée.

 

Pour soutenir sur la durée les startups Healthtech en forte croissance, Bpifrance peut également compter sur l’équipe spécialisée en santé de son fonds Large Venture. Doté de 1,75 milliard d’euros, sa mission reste inchangée depuis sa création en 2013 : assurer le continuum des premiers tours de financement VC quand les levées deviennent très importantes et permettre, selon les cas, aux plus beaux projets d’atteindre le marché, d’accélérer la croissance de leurs ventes, voire même de devenir rentables et par conséquent éligibles à une intervention des acteurs du capital développement. On notera les prises de participation récentes dans des sociétés comme DNA Script, Dynacure, ou encore Owkin.

Maintenir la position de la France

 

Obtenir l’accès à des capitaux en dehors de nos frontières est l’une des préoccupations les plus importantes de nombreux entrepreneurs du secteur. C’est d’autant plus important que beaucoup d’entrepreneurs ne cherchent pas uniquement des fonds lorsqu’ils font entrer des investisseurs étrangers au capital mais aussi et surtout un réseau et des contacts sur un marché qu’ils connaissent peu ou mal. Concept très popularisé dans le secteur Tech, le « smart money » est aussi recherché par les entrepreneurs dans la santé qui se tournent assez tôt dans leur développement vers l’international.

 

Si l’accès à des capitaux étranger était une préoccupation déjà très présente avant la crise sanitaire de la Covid-19, il est légitime de se poser la question au regard des évènements récents : est-ce que le choc économique et la restriction, voire l’arrêt brutal des déplacements aura aussi un impact sur la circulation des capitaux ?

 

Pour le secteur de l’innovation en santé, il paraît primordial de préserver les ingrédients qui ont permis à la France d’être de plus en plus attractive aux yeux des investisseurs étrangers. Il est aussi indispensable de maintenir l’activité d’investissement dans le secteur et éviter ainsi de briser une dynamique qui a commencé à porter ses fruits. C’est la raison pour laquelle Bpifrance a poursuivi ses investissements, même en période d’incertitude liée à la crise, dans des sociétés HealthTech comme Dynacure, Owkin ou encore Ambler.

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