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La question de la gestion de son board est peu abordée et pourtant se trouve au cœur des préoccupations des entrepreneurs : mon board est-il utile, que dois-je lui communiquer, ai-je les bonnes personnes autour de la table, comment en tirer le maximum ?

Une discussion ouverte sur ce sujet avec Jean-Jacques Garaud, CEO de Inotrem et membre de plusieurs conseils d’administration, notamment ENYO Pharma, et plusieurs entrepreneurs HealthTech accélérés au sein de Bpifrance Le Hub a permis d’aborder certaines de ces questions et de partager des éléments de réponses. Voici un condensé des « Tech Away » de cette session.

Le rôle premier du « Board » ou Conseil d’Administration (CA) est un rôle fiduciaire : il représente tous les actionnaires et doit défendre l’intérêt collectif (s’assurer que l’argent investi est utilisé selon l’objectif d’investissement initialement défini). Chaque membre a un rôle neutre et doit donc être prêt à placer les intérêts de l’entreprise avant les leurs.

Le Conseil d’Administration a également un rôle stratégique pour valider les orientations de l’activité de la société et veiller à leur mise en œuvre.

#1 : ANTICIPER LES IMPLICATIONS D’UNE LEVÉE DE FONDS SUR LA BONNE GESTION DE SON CA

Pour assurer un alignement des philosophies des différents investisseurs au board, il peut être judicieux de maintenir l’équilibre dans les capacités d’investissement des investisseurs : si certains investisseurs ont les poches profondes et d’autres moins, le risque est d’avoir des différences trop importantes (e.g. timing avant la serie B : urgence vs. pouvoir attendre un peu).

La « term sheet » est également une étape importante à ne pas sous-estimer afin de définir des règles de fonctionnement claires, notamment les droits de veto.

Et dans le cadre d’une levée de fonds aux Etats-Unis, avoir des investisseurs américains peut être très bénéfique, mais s’ils sont surreprésentés, cela peut devenir trop dogmatique.

#2 : ÉQUILIBRER LES PROFILS ET RECRUTER AVEC SOIN

Pour que le Conseil d’administration joue son rôle au mieux, il est important de maintenir un équilibre dans sa composition :

  • Parité entre représentants indépendants industriels et investisseurs :
    • Sélectionner les investisseurs en fonction de leur part au capital (en général >5% de participation)
    • Choisir des représentants indépendants orientés « business » ou « science » (plutôt scientifiques en « early stage », et business / investisseurs en « late stage »)
  • Panache de profils autour de la table : apport de séniorité, diversité d’identités et d’expériences, équilibre de genre

Le profil de chaque administrateur joue un rôle important pour l’équilibre du board, aussi l’étape du recrutement est critique :

  • Vérifier les motivations, les compétences et la disponibilité des candidats
  • Prendre le plus de références possibles, en appelant les CEOs des sociétés pour lesquelles le candidat est déjà administrateur
  • Vérifier le risque de conflits d’intérêts

Il est plus simple d’avoir un nombre impair de membres pour les votes ; au-delà de ~7 membres il devient souvent plus difficile de gérer les discussions. La 1ère composition est la plus importante, il faut veiller à prendre en compte les personnalités et susceptibilités éventuelles.

Un exemple de composition :

  • Investisseur principal : 1 ou 2 sièges
  • Fondateurs historiques : 1 ou 2 sièges (observateur, censeur…)
  • Un Business Angel
  • Un autre fonds d’investissement

#3 : BIEN CHOISIR SON PRÉSIDENT DE CA

Le Président du Conseil d’administration joue un rôle critique dans la gestion du board :

  • Il est responsable de la conduite des discussions : il doit s’assurer que les bonnes discussions sont menées, que les décisions sont prises dans le temps imparti
  • Il fait le lien entre les réunions de CA : il doit sonder les attentes, faire le lien avec les investisseurs et anticiper les questions
  • Il a un rôle de médiateur entre investisseurs : par exemple en cas de refinancement
  • Il peut se permettre d’être plus inquisiteur envers le dirigeant et l’équipe que les autres membres du CA, pour s’assurer de sa compréhension complète de la situation

Il est souvent préférable d’éviter que ce soit le dirigeant de l’entreprise : il est en effet très difficile pour une seule personne de tout gérer à la fois (présentation, gestion des discussions, timing, prise de décision…).

Le choix Président est donc critique, s’il est souvent coopté par les membres du board, il est important de s’assurer qu’il réunit certaines qualités :

  • Etre indépendant
  • Un bon leadership pour être capable de manager les membres du board
  • Une expérience pertinente pour pouvoir accompagner le dirigeant (et la motivation)
  • Une disponibilité suffisante
  • Etre choisi en coordination avec l’investisseur principal (parmi des CEOs par exemple)
PAS ENCORE INSCRIT SUR LA PLATEFORME DU HUB ?

#4 : PRÉPARER SON BOARD MEETING

Valider les sujets en amont :

  • Valider au moins un mois à l’avance les sujets à traiter. C’est l’un des rôles du Président, entre deux réunions de CA, de relever les sujets à traiter au cours des prochains boards auprès des autres membres du conseil.
  • Revoir ce qui a été dit dans les boards précédents pour faire le point sur ce qui s’est passé depuis et mettre à jour du plan d’action.
  • Préparer les sujets avec l’équipe en interne : décision à prendre, variations vs. prévision et solutions à apporter.

Bien préparer les documents :

  • Structurer son document de présentation : par exemple, commencer par une première slide avec les objectifs et les points de décision : qu’est-ce qu’on attend du board ?
  • Pour éviter les discussions trop longues lors de la présentation, soumettre les sujets « pour recommandation » avec vote des administrateurs et clarifier le « pour info » (en l’évitant au maximum).
  • Envoyer des pre-reads (rapport rédigé, présentation, détail des sujets qui vont être discutés…) 1 semaine à 3-4 jours avant la réunion en fonction de leur longueur.
  • Revoir les pre-reads et le document de présentation en amont avec le Président, et faire une répétition la veille de la réunion (« dry-run »).

#5 : BIEN ANIMER ET ADAPTER L’AUDIENCE DU BOARD MEETING

  • Solliciter les opinions des membres du CA sur différents scénarios pour arriver naturellement à la recommandation choisie. Si un autre scénario est proposé, il pourra être évalué en direct (et écarté éventuellement) ou alors analysé ultérieurement et discuté à la réunion suivante.
  • Faire participer l’équipe de management pour les impliquer et les exposer. Attention cependant à s’assurer de leur alignement total sur la stratégie. Il faut également leur indiquer que leur participation se fait sur leur partie uniquement et n’est pas systématique, pour éviter toute frustration.
  • Ne pas hésiter à mettre en place des « closed sessions » en demandant à certains administrateurs, aux équipes management, et parfois au CEO de sortir le temps de laisser les administrateurs discuter. Cela permet de prévenir les conflits d’intérêts, d’encourager une discussion libre et de désamorcer certaines situations difficiles. Dans ce cas, il est important de bien prévenir les personnes en amont et de mettre en place cette configuration dès le départ pour ne pas que cela crée des frustrations ou apparaisse comme une anomalie soudaine.
  • Garder un temps de discussion informelle après le board (dîner, verre), c’est souvent le bon moment pour développer certains points ou répondre à des inquiétudes.

#6 : COMMUNIQUER RÉGULIÈREMENT ET AVEC LE BON NIVEAU DE TRANSPARENCE

Il est également indispensable de communiquer le bon niveau d’information aux administrateurs en amont de la réunion :

  • Communiquer le maximum d’information aux membres en amont pour favoriser l’alignement et une prise de décision plus rapide (pre-reads).
  • Maintenir la transparence est clé pour gagner la confiance. Si des résultats sont négatifs, il vaut mieux les communiquer rapidement (surtout si le risque est important pour l’entreprise) et présenter le plan d’actions correctives ou le délai pour le leur présenter.
  • Assurer une information continue : anticiper au maximum les questions, avoir un temps d’avance, ne pas leur donner l’impression qu’ils découvrent des choses. Des points de contacts réguliers aident à maintenir la communication entre les réunions de CA (ex : déjeuners avec les investisseurs, call avec les indépendants…).

Retrouvez nos conseils dans cette infographie interactive.

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