Scalinx, spécialiste des semi-conducteurs, lève 34 millions d’euros pour devenir un leader européen de la conception de système sur puce

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Scalinx, entreprise « fabless » française de semi-conducteurs et spécialisée dans la conception de circuits intégrés pour la conversion analogique-numérique et numérique-analogique, a sécurisé un second tour de financement d’un montant global de 34 millions d’euros, dont environ la moitié en augmentation de capital.

L’entreprise entend ainsi devenir la référence européenne sur les marchés stratégiques des infrastructures de communication 5G et 6G ainsi que la conduite autonome. De quoi libérer l’Europe de sa dépendance pour ces composants clés vis-à-vis de fournisseurs américains et asiatiques.

En bouclant cette levée auprès de l’Etat français – via son fonds French Tech Souveraineté, un programme géré par Bpifrance -, Go Capital et Thales, la startup va pouvoir accélérer sur sa stratégie commerciale, élargir sa clientèle et recruter massivement.

Pour tout savoir de l’histoire et du futur de Scalinx, découvrez notre interview de son fondateur et CEO, Hussein Fakhoury.

 

Pouvez-vous nous raconter la genèse de Scalinx ?

Scalinx, c’est un projet entrepreneurial que j’ai mûri de longue date et que j’ai toujours eu envie de faire. J’avais 7 ans quand j’ai démonté mon premier jeu électronique et j’ai toujours été fasciné par ce qu’il y avait à l’intérieur. En dernière année d’école d’ingénieur, pour un projet d’étude, j’avais choisi de parler de la société que je créerais un jour dans le secteur du semi-conducteur. J’ai toujours eu cette fibre entrepreneuriale. Avec cette passion pour la microélectronique, que je suis depuis plus de 20 ans aussi bien d’un point de vue marché que d’un point de vue technique, il était naturel que je crée une entreprise dans ce domaine.

J’ai créé Scalinx en 2015, une fois que je me suis senti prêt. Avant de créer la startup, j’ai passé 12 ans dans l’industrie du semi-conducteur en travaillant dans un grand groupe, dans une startup et dans la recherche appliquée. Je sentais qu’il y avait un besoin sur le marché d’avoir un acteur européen dans le domaine de la conversion du signal, car il y en avait peu jusqu’alors.

 

Quels grands jalons ont marqué l’évolution de la société ?

Nous avons parcouru beaucoup de chemin en 8 ans, même si tout n’a pas toujours été simple. Au démarrage, il y avait un salarié. Le premier événement qui a été un véritable tournant pour la société a été le premier contrat commercial gagné sur le marché des équipements de Test & Mesures. Nous étions 5 à cette époque-là. Dans notre domaine, c’est très difficile de convaincre des donneurs d’ordre de vous confier des projets qui vont coûter beaucoup d’argent, qui vont être longs et risqués. Mais nous y sommes parvenus et, qui plus est, en allant chercher ce contrat à l’étranger, au Royaume-Uni. Ce contrat représentait plusieurs millions d’euros et nous a permis de vraiment lancer la société, de grandir, de recruter, de déposer des brevets et de développer toute la technologie.

Il y a aussi eu une première levée de fonds en 2021, qui a été précédée de l’ouverture d’un site en Normandie en 2018, à Caen plus précisément, et d’un autre à Grenoble, en 2020, qui ont été très importants dans notre développement. Entre-temps, nous avons signé un 2e gros contrat avec Thales dans le domaine de la Défense, qui a été clé pour la poursuite de notre développement.

Nous étions autofinancés les 5 premières années, et la levée de fonds de 2021 avait pour objectif de nous faire rentrer sur le marché des télécoms et de nous permettre de développer nos propres produits.

 

Plus concrètement, quels sont les marchés visés par Scalinx et quelles sont les applications potentielles pour ses produits ? 

Nous évoluons sur plusieurs marchés. Premièrement la défense, donc, secteur sur lequel nous sommes déjà implantés et voulons continuer à travailler. Les applications sont assez larges : cela peut être des radios tactiques, du radar, de la localisation ou des projets spatiaux, par exemple de la communication par satellite. Nous sommes aussi capables de répondre à des besoins pour de l’équipement tests et mesure. Nous avons développé un savoir-faire et des puces pour ces usages et produits spécifiques, par exemple les oscilloscopes.

Plus récemment, nous sommes rentrés sur le marché des infrastructures de communication, secteur sur lequel nous souhaitons adresser toute la partie permettant de transporter l’information du cœur du réseau 5G vers les antennes 5G, et bientôt 6G. Dans les télécoms, les usages peuvent être nombreux, par exemple sur les communications optiques. Dans le futur, nous souhaitons également attaquer le secteur automobile.

 

©Scalinx

 

Scalinx lève 34 millions d’euros : à quels axes de développement vont servir ces fonds ? Pourquoi avoir choisi Bpifrance ?

Avant d’être investisseur, Bpifrance nous a soutenus via du financement. Il me paraissait donc naturel, lorsque l’on a voulu faire rentrer des investisseurs, d’aller solliciter ce partenaire historique, solide, qui nous a toujours soutenus. De plus, notre activité comporte un aspect souveraineté important. C’est pourquoi il était important de nous allier à des acteurs de financement français et nous nous sommes donc naturellement tournés vers Bpifrance.

Cette levée vient en complément d’un gros contrat sur le marché des télécoms que nous avons remporté auprès d’un équipementier, pour lequel nous devons développer un composant. La levée vient donc sécuriser le développement de ce produit. Pour ce faire, cela passe évidemment par du recrutement. Nous devons renforcer l’équipe sur plusieurs types de métiers, majoritairement des ingénieurs sur de la conception analogique, de la conception numérique, du logiciel embarqué…

Nous avons pour objectif d’être 140 dans les 24 à 36 prochains mois, donc de quasiment doubler la taille des effectifs.

 

La crise des semi-conducteurs est-elle définitivement derrière nous ?

Les crises dans le domaine du semi-conducteur sont très cycliques. D’expérience, je dirais qu’elles ne se sont jamais arrêtées et qu’il y en aura toujours, notamment quand on voit les tensions géopolitiques qui peuvent exister entre Taïwan, la Chine, les USA… On parle beaucoup d’un potentiel envahissement de Taïwan par la Chine. Cela pourrait causer une crise majeure. Mais un autre événement inattendu pourrait tout aussi bien produire une crise…

Toutefois, pour se prémunir contre ces crises, il est important d’avoir pris conscience de ce besoin d’avoir des acteurs et un écosystème européens solides, au niveau des semi-conducteurs, mais aussi de la chaine d’approvisionnement dans tout ce qui concerne la fabrication, l’assemblage, la conception, etc. On parle beaucoup des usines qui fabriquent des composants, mais il ne faut pas oublier que la conception se fait majoritairement aux USA et en Asie. Il faut donc qu’en Europe et en France, nous ayons des acteurs qui fassent du design de puces, qui soient innovants et qui soient toujours à l’état de l’art.

C’est pourquoi nous avons besoin des autorités publiques et du rôle qu’elles peuvent jouer, comme avec le plan France 2030 qui est un merveilleux exemple, mais aussi d’investissements privés, afin d’avoir un soutien solide dans cet objectif.

 

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