L’année passée, aux Etats-Unis, Facebook et Google ont connu une croissance supérieure à celle du marché de la publicité en ligne. Ces derniers ont ainsi capté plus de 101% des nouveaux revenus entre 2015 et 2016*, laissant la majeure partie des acteurs de l’AdTech (« Advertising Technology ») en reste.
« Le marché ressemble un peu à une forêt de bonsaïs : chacun à réussi à pousser avec sa part de soleil, mais finalement on est tous dans l’ombre des séquoias que sont Google et Facebook »
Pierre-Antoine Durgeat, CEO d’ADventori.
Mais l’idée n’est pas ici de s’épancher sur le statut hégémonique de ce duo. Aujourd’hui, la véritable problématique qui se pose à l’ensemble des startups sur le marché de l’AdTech est :
Comment survivre et se développer au sein d’un oligopole bien installé ?
Certaines success stories françaises telles que celles du bien connu Criteo, mais également de Teads (43 millions d’euros de dette levés en 2016) ou encore de StickyAdsTV (racheté par Comcast pour 100 millions d’euros en 2016) nous montrent qu’il est encore possible de réussir à challenger l’ordre établi sur le marché de l’Adtech. Les raisons d’être optimiste ne s’arrêtent pas là. Alors que les investissements mondiaux dans les startups AdTech ont chuté de plus de 30% en 2016**, la France tire son épingle du jeu. En effet, les fonds de VCs français n’ont jamais été aussi actifs dans l’AdTech qu’aujourd’hui. La France s’impose de plus en plus comme le pays à suivre dans le domaine de la publicité digitale.
Pourtant le marché reste aujourd’hui trop atomisé pour se dresser comme une véritable troisième force face aux deux goliaths, Facebook et Google. L’objectif collectif doit être la simplification et l’assainissement du marché afin de le consolider.
Que faire ? Quelles stratégies adopter pour durer ?
Deux écoles coexistent : celle qui prône de se positionner sur un segment spécifique de la chaîne de valeur de la publicité en ligne et d’être le meilleur, et celle de ceux qui font le choix de proposer une offre, la plus complète soit-elle. C’est par exemple ce qu’a fait Xavier Mariani, co-fondateur et CEO d’Adikteev :
« La constante évolution technologique et le nombre d’acteurs du marché digital ne contribue pas à rassurer les annonceurs. Comprendre les spécificités techniques de chaque interlocuteur devient un véritable challenge. Afin de répondre à ce marché atomisé, nous avons opté pour la combinaison de trois briques technologiques complémentaires. Un atout pour les annonceurs qui ont ainsi un partenaire unique, capable de répondre à l’ensemble de ses problématiques desktop et mobiles, qu’elles soient orientées branding ou performance ».
La solution peut résider dans un mélange de ces deux visions : développer des outils technologiques spécifiques pointus et mettre en place des partenariats stratégiques pertinents entre acteurs proposant des offres complémentaires. C’est ce que promeut Rudy Lellouche, Chief Strategy Officier et General Manager France d’Adyoulike : « Je pense tout simplement que chaque acteur doit se concentrer sur son savoir-faire et trouver sa cible. Pour exister, il faut proposer au marché une technologie innovante et avoir de l’ambition ! Je suis pour la collaboration, voire les partenariats stratégiques entre acteurs de la French Tech, afin de monter des offres toujours plus fortes ensemble, en France et à l’international ! ». C’est également ce que recommande Olivier Reynaud, Co-founder et Chief Creative Officer de Teads.tv : « La force d’innovation est clé pour résister face à des plateformes où l’UX et la techno sont le coeur du réacteur. Il faut savoir faire du build-up et réunir des entrepreneurs pour scaler au plus vite ». La stratégie de la start-up montpelliéraine est intéressante. Elle aide les éditeurs à constituer une 3ème force face aux grandes plateformes. Et ça marche ! Teads dispose désormais d’un reach plus puissant que Facebook et Youtube aux USA, UK et en France (87% de reach selon médiamétrie contre 83% pour Facebook et 76% pour Youtube).
De manière générale, il est important pour les acteurs de la scène AdTech d’avoir une proposition de valeur claire ainsi qu’une technologie performante, renforcée par des résultats mesurables et transparents. Par exemple, Adikteev propose un « modèle de facturation à la performance qui nous permet d’être totalement alignés avec nos clients et de les accompagner dans une démarche purement ROIste tout en limitant leur risque au maximum ».
Les alliances ne s’arrêtent pas à la complémentarité d’offres de différentes startups. Il est également possible pour celles-ci de travailler en collaboration avec des grands groupes afin d’innover toujours plus. C’est le cas d’Adyoulike, qui a intégré le logiciel d’intelligence artificielle Watson d’IBM afin de créer un meilleur ciblage sémantique pour la publicité native. D’autres, comme ADventori, on fait le choix de se lier à des agences de communication. Ces dernières ont en effet aujourd’hui de plus en plus un rôle de veille technologique afin de savoir identifier les technologies pertinentes aux yeux des annonceurs.
En bref, la formation d’alliances semble être une des clés de voûte du succès pour survivre à la future rationalisation du marché. D’autant plus que les évolutions à venir concernant la législation vont conduire les différents acteurs de la publicité digitale à faire face à de nouveaux challenges.
« S’allier pour disrupter, s’allier pour exister » pourrait bien être la nouvelle devise des acteurs du marché de l’AdTech en 2017.
* Interactive Advertising Bureau
** CBInsights
Business Partner au Hub Startups de Bpifrance, Pierre Garrigues est passionné de digital, d’innovation, de business développement et d’international.