Le concept de « Smart City », concept international imaginé il y a plus de 10 ans, a beaucoup évolué ces dernières années. Il dépasse aujourd’hui largement le cadre des grandes villes ou des métropoles. Il s’applique de plus en plus aux villes dites petites ou moyennes, aux territoires ruraux, aux régions et aux quartiers, pour autant que l’on puisse définir la maille pertinente afin de mener des actions collectives, mutualisables, efficaces et surtout utiles.
Les villes intelligentes se multiplient et le concept continue de progresser grâce notamment :
- au développement inéluctable des technologies numériques dans la vie quotidienne
- aux évolutions des comportements socio-professionnels des citoyens
- aux besoins des opérateurs et gestionnaires des territoires d’optimiser les coûts
- au besoin des villes et des communautés d’agglomération d’être attractives, de créer des emplois et de nouveaux services valorisables
L’important aujourd’hui est d’encourager les applications et usages innovants dans la « vraie vie » et permettant le passage à l’échelle sur le plus grand nombre de territoires. Il s’agit également de faire place aux praticiens des villes et territoires qui développent de véritables lieux d’innovation urbaine et de bien-être.
Le citoyen au cœur de toutes les préoccupations
Quasiment tous les exposés sur les sujets de la « Smart City » proposent de mettre le citoyen au centre de la ville innovante, intelligente et durable. Le consommateur devient ainsi consomm’acteur – c’est à dire acteur dans sa ville, sur son territoire.
« il s’agit d’abord de replacer l’usager au cœur de la stratégie publique, de chercher à répondre à ses besoins et de concentrer les efforts à la mise en place d’une « expérience utilisateur » riche, positive et inclusive. En remettant l’habitant, le citoyen, au centre de la démarche publique et en acceptant de construire cette démarche avec l’ensemble des acteurs volontaires, la ville deviendra alors plus intelligente. « Smart City » est un terme commun qui nous a permis de parler et de faire parler de l’innovation urbaine, sociale, de la participation citoyenne, des communs, de tous ces problèmes fondamentaux de nos sociétés. »
Luc Belot, ancien Député de Maine-et-Loire
Dans la même dynamique, la ville de Mulhouse a lancé un programme expérimental, « Mulhouse c’est vous ! », dont l’ambition est de mettre le citoyen au cœur de la vie publique grâce à une plateforme permettant à chaque Mulhousien de s’impliquer, d’échanger et de participer aux projets pour construire leur ville de demain.
Des réseaux d’infrastructures intelligents, générateurs d’applications innovantes
L’expérience utilisateur est en grande partie améliorée par les infrastructures intelligentes ou smart grids au sens large. Elles permettent des applications ou services pertinents dans tous les domaines de la ville, et en particulier dans les lieux de vie et de travail que sont les bâtiments résidentiels (smart homes), tertiaires (smart buildings) ou industriels (smart factories). De multiples solutions existent déjà, il s’agit de les implémenter, les maintenir, les exploiter et les utiliser.
Jean Rottner, Maire de Mulhouse, impulse le mouvement en poussant sa ville à expérimenter des solutions numériques à la fois utiles et économiques.
« Une « Smart City », c’est une ville agile, qui explore les solutions numériques les plus pertinentes, du stationnement à l’éclairage public, en passant par le wifi gratuit, sans tomber dans les modes, mais en choisissant pour chaque application la meilleure solution ».
La révolution des écoquartiers en construction ou en réaménagement
L’intelligence des réseaux physiques est devenue une réalité. Qu’ils soient d’énergie, de transport, d’eau, de déchets… ils vont définir les usages de demain. Ces réseaux irriguent les quartiers et leur donneront, une fois consolidés, un avantage concurrentiel tout en dynamisant le territoire dans son ensemble.
Une véritable politique d’urbanisation des technologies et d’architecture « durable » intelligente permettra de transformer l’espace public et de valoriser la ville au travers de nouveaux services intégrés. Les architectes et services d’urbanisme doivent associer des réseaux de capteurs avec des réseaux sociaux en y intégrant tous les domaines (énergies, eau, déchets, transports, sécurité, santé, etc.) pour faire des citoyens de véritables acteurs de la ville intelligente et durable.
Hugues Parant, Directeur Général de l’EPA Euroméditerranée, pense l’urbanisme d’après les usages. « Faire vie » avant de « faire ville », et ce, selon 3 principes :
- l’innovation technologique, environnementale et sociale ;
- la créativité comme dimension centrale de la construction du projet ;
- la création d’un lien social dans un quartier ouvert sur son environnement.
Ceci est en cours à Marseille grâce, en particulier, aux partenariats d’innovation et à de nouveaux processus collaboratifs avec des grands groupes de la promotion immobilière et du BTP.
Le bien-être et la santé au cœur des quartiers
De plus en plus d’applications et services adaptés aux citoyens et maîtrisés par la collectivité ont vocation à sécuriser et fidéliser les usagers tout en développant une nouvelle économie servicielle.
Frédérique Macarez, Maire de Saint-Quentin, explique que sa ville veille à un accompagnement social organisé avec des instruments permettant de nourrir l’innovation en assurant un meilleur suivi médical pour les patients, de l’hôpital jusqu’au maintien à domicile.
Les innovations juridiques pour passer de l’économie de la propriété à celle de l’usage
Afin que le décloisonnement des métiers et des usages devienne une réalité, il est nécessaire de lever les barrières réglementaires et ainsi dégager de nouveaux modèles contractuels, économiques, humains et sociétaux. Cela permettra de réaliser des économies d’échelle au niveau d’une collectivité, tout en augmentant le bien être en milieu urbain ou rural.
Dans cet objectif, les comportements innovants et collaboratifs ainsi que toutes les formes de partenariats publics et privés doivent être explorés et exploités.
Patrice Vergriete, Président de l’Institut Ville Durable, Maire et Président de la Communauté Urbaine de Dunkerque milite pour développer de nouvelles formes de gouvernance locales avec 6 propositions formulées aux pouvoirs publics pour une ville durable et résiliente.
Tranquillité et sécurité publique : une priorité pour les années à venir
Au-delà de la résilience qui devient une des composantes essentielles de la résistance d’un territoire, la sécurité des biens et des personnes reste la première priorité des citoyens et des élus : « Sans sécurité et tranquillité il ne peut y avoir de bien être ».
Ainsi, sous l’impulsion de Christian Estrosi, Maire de Nice, la ville a mis en place des solutions innovantes de sécurisation intelligente des espaces et des bâtiments publics. Nice cherche à se positionner comme la première Safe City en France, grâce à une plateforme faisant appel à l’intelligence artificielle des métiers de la ville.
L’intelligence collective au cœur de la ville intelligente
Les innovations techniques et sociales offrent la possibilité d’élargir l’espace public autour de l’engagement des citoyens, de la créativité et de la cohésion. Les villes qui ont le plus marqué l’histoire sont celles où les gens aimaient se retrouver pour créer, parce qu’elles étaient plus ouvertes que d’autres. Les villes innovantes ont toujours été des cœurs de réseaux. Ce sont celles qui favorisent la présence de clusters, d’incubateurs et d’accélérateurs, où l’innovation et l’esprit d’entreprendre des PME / startups pourra le mieux s’exprimer.
Dans un contexte de découplage entre croissance économique et progrès social et, où l’investissement public actionnera l’investissement privé, les nouvelles approches de gouvernance partenariale sont fondées sur une concertation des habitants et des acteurs du développement territorial.
La « Smart City » du 21ème siècle s’oriente vers un espace plus social, un lieu de partage et de projets collectifs où la communication et la coopération entre citoyens témoigneront de la modernité d’une ville.
Les échanges et partages d’expériences favoriseront les projets collaboratifs et participatifs, et permettront de progresser ensemble dans la transition « Smart City » des quartiers, des villes, des villages, des métropoles et des zones d’activités.
Après 40 années d’expérience dans l’industrie électrique les automatismes et les technologies numériques, Jean-Marc Molina est maintenant co-organisateur de la convention internationale des villes intelligentes et durables Innovative City qui se tient annuellement à Nice depuis 2012.