Marion Carré : l’entrepreneuse qui concilie IA et culture avec Ask Mona

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Passionnée par l’IA et l’art, Marion Carré n’a pas voulu choisir entre les deux. Au contraire, elle a relevé le défi de les concilier avec sa solution Ask Mona. Résultat ? Elle a réussi à démocratiser l’accès à la culture pour le plus grand nombre.

 

Une volonté de relier les lieux et les visiteurs, le point de départ de l’aventure entrepreneuriale

L’éclectisme a toujours caractérisé Marion Carré, et ce, dès le début de ses études. Elle suit en effet une double licence en Droit et en Histoire, puis intègre le CELSA, l’École des Hautes Études en Sciences de l’Information et de la Communication.

Au cours de ce cursus, l’idée lui vient alors de créer un média sur l’Histoire : « J’ai décidé de lancer ce média sur l’histoire de Paris parce que je trouvais qu’on passait chaque jour devant des lieux qui avaient une histoire assez fascinante, mais que, la plupart du temps, on ignorait. »

Le format s’impose de lui-même : pour toucher une audience jeune, le digital est le plus adapté. Et cela fonctionne ! Rapidement, une communauté de passionnés et de curieux se forme sur les réseaux sociaux. En parallèle, certaines institutions culturelles contactent l’étudiante afin de rencontrer ce public dont elle a éveillé la curiosité.

 

C’est ce point de jonction entre les institutions culturelles et le public qui s’avère être le point de départ de l’aventure entrepreneuriale de Marion Carré. En compagnie de Valentin Schmite, également cofondateur d’Ask Mona, cette amatrice de musées d’art se pose alors la question suivante : « Comment peut-on faciliter la découverte des sorties culturelles en misant sur l’innovation ? ».

Heureux coup du sort : c’est à ce moment précis que le Ministère de la Culture lance l’appel à projets « Service numérique innovant 2016 ». Marion Carré et Valentin Schmite développent alors un chatbot, réalisé en partenariat avec le Centre des monuments nationaux et Paris Musées.

Une opportunité saisie par les deux futurs entrepreneurs, lauréats de ce concours. Ce qui était un simple projet va alors se muer en véritable aventure entrepreneuriale.

 

 

 

L’IA au service de la transmission des savoirs : une idée bien accueillie

La création d’Ask Mona en 2017 nourrit ainsi des recherches que mène par la suite Marion Carré pour rédiger son mémoire sur le thème de l’intelligence artificielle au service de la culture : « Déjà, à l’époque, ce mémoire était l’occasion pour moi de prendre un peu de recul et de réfléchir à l’impact de cette technologie sur les publics des différentes institutions culturelles ».

Malgré certains défis à relever, l’initiative des deux co-fondateurs est soutenue de manière optimiste et constructive par un secteur de la culture très ouvert à la nouveauté : « Quand on prend un peu de recul sur les innovations des dernières décennies, on se rend compte qu’assez souvent, le secteur culturel est précurseur sur les innovations. les actions culturelles ont favorisé l’expérimentation. Les artistes notamment font généralement partie des premiers à s’emparer des technologies pour les questionner et les mobiliser dans leur pratique. »

 

L’essor d’Ask Mona, de Paris jusqu’au Québec

En 2018, la startup réussit une première levée de fonds de 500 000 euros auprès de plusieurs business angels. Plus récemment, en 2021, Ask Mona réalise une série A de 2 millions d’euros auprès du fonds Tech & Touch géré par Bpifrance.

Pour Marion Carré, ces levées répondent à des besoins essentiels : « Quand on pense aux levées de fonds, il y a effectivement un enjeu monétaire. Toutefois, ce qui est encore plus enrichissant, c’est de trouver des personnes capables d’apporter une expertise en soutien, en accompagnement, pour faire grandir l’entreprise ».

La croissance de la jeune pousse se poursuit et, au fil des années, Ask Mona développe une suite de solutions conçues pour les institutions culturelles, comme des chatbots d’information, des guides de visites conversationnels ou des magnets intelligents. Dans le détail, cette offre globale se déploie tout d’abord en amont de la visite, avec des chabots capables de répondre aux questions pratiques des visiteurs, ce qui facilite leur venue sur le site culturel. Pour ce faire, l’IA générative mobilise des informations situées dans une base de connaissances prédéterminée et nourrie par les équipes de l’organisation culturelle.

Puis, pendant la visite, Ask Mona a créé un audioguide avec lequel les visiteurs peuvent discuter accessible depuis leur téléphone. Grâce à cette innovation, ils peuvent poser n’importe quelle question à l’écrit ou à l’oral sur les œuvres d’art ou les points d’intérêt rencontrés au cours de leur visite.

Enfin, après la sortie culturelle, les visiteurs ont la possibilité d’acquérir des magnets intelligents. Dans quel but ? Dialoguer avec l’intelligence artificielle d’un personnage historique ou d’une œuvre figurée sur le magnet grâce à un QR code caché au dos. Cette interaction prolonge l’expérience culturelle et s’avère être une nouvelle source de revenus pour l’établissement.

 

capture d'écran solution ask mona

Le Chatbot d’information d’Ask Mona – ©Ask Mona

 

Pas à pas, la jeune pousse devient donc un acteur clé du monde de la culture. L’entreprise a désormais accompagné plus d’une centaine d’institutions culturelles réparties dans sept pays, principalement en Europe, et elle ne compte pas s’arrêter là : Ask Mona se développe actuellement en Amérique du Nord.

 

Ask Mona, un intermédiaire technologique essentiel entre les contenus culturels et le public

Pour cette habituée du musée Carnavalet, Ask Mona a su dépasser l’apparente contradiction issue du mariage entre le singulier de l’œuvre d’art et l’approche globalisante de l’intelligence artificielle : « On ne peut résumer l’acte de création à la production d’une image, d’un texte ou d’une vidéo. L’artiste a une réflexion en amont. L’IA, quant à elle, est une sorte de boîte à outils au service de créateurs. Elle ne fait pas disparaître le créateur en tant que tel, elle l’accompagne ».

Mais est-ce que se munir d’un smartphone pour regarder une œuvre ne briserait pas une sorte d’immédiateté, une forme de naïveté du regard, nécessaire à la rencontre avec une œuvre ? Pour la CEO de la startup, « parfois, on peut passer à côté d’une œuvre, car on n’a pas à disposition les informations nécessaires pour la comprendre. On ne voit alors qu’une toile blanche sur un mur blanc ». De plus, « lorsque l’on visite une institution culturelle, il est possible de se sentir perdu et de ne pas oser poser des questions qui pourraient nous sembler maladroites aux guides pourtant présents dans la salle ».

La technologie peut donc être une médiation essentielle entre le monde de l’art et le visiteur. Tout le projet d’Ask Mona est ainsi de fournir aux visiteurs les clés leur permettant de s’approprier les contenus culturels pour commencer à les apprécier et les comprendre, en complément les guides et médiateurs culturels.

Le Guide de visite conversationnel d’Ask Mona – ©Ask Mona

 

Ouvrir la voie aux femmes avec des modèles de proximité

Son parcours le montre : Marion Carré réussit une carrière brillante dans le monde de la technologie. Or, les femmes ne sont pas nombreuses à se lancer dans cette aventure entrepreneuriale. C’est pourquoi elle insiste sur l’importance de « mettre en avant des pionnières françaises, avec cet enjeu des rôles modèles accessibles, afin d’inspirer plus de femmes à se lancer dans la Tech ».

L’amoureuse des arts et des techniques a donc publié en 2024 un ouvrage intitulé « Qui a voulu effacer Alice Recoque ? Sur les traces d’une pionnière oubliée de l’IA » aux éditions Fayard. Ce livre revient sur la vie d’une scientifique exemplaire qui a pourtant été effacée de l’Histoire. La présidente d’Ask Mona y développe également l’idée de « modèles de proximité », plus atteignables qu’Ada Lovelace ou Marie Curie : « Se comparer à une femme ayant reçu deux prix Nobel, une actrice, une comtesse ou à différents modèles historiques est parfois complexe. Ce qui est assez important est d’avoir des modèles variés qui évoluent en fonction de nos stades d’avancement ».

Gageons qu’à son tour, elle inspire une nouvelle génération d’entrepreneuses françaises audacieuses et innovantes !

 

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