Cellectis, entreprise de biotechnologie française basée à Paris, a conclu un partenariat avec un géant du secteur pharmaceutique, AstraZeneca (Royaume-Uni), comprenant « une collaboration stratégique et un accord d’investissement. »
Cotée en Bourse (Nasdaq et Euronext), Cellectis (participation Bpifrance Innovation – Pôle d’Investissement Bpifrance Large Venture) développe des immunothérapies allogéniques innovantes pour traiter certains cancers en utilisant son expertise dans le domaine de l’ingénierie des génomes. Forte de ses 220 collaborateurs, la société a suscité l’intérêt d’AstraZeneca, qui a signé avec elle un accord de collaboration pour développer jusqu’à dix produits de thérapie cellulaire complété d’une prise de participation via un investissement en equity.
Dans le cadre de cette collaboration, Cellectis a reçu 220 millions de dollars en equity et un paiement d’upfront de 25 millions de dollars. Selon les termes de l’accord, Cellectis est également éligible pour recevoir des paiements d’étape et royalties liés au développement des produits sur 25 cibles potentielles.
Cet accord a pour objectif « d’accélérer le développement de la prochaine génération de thérapies dans des domaines à fort besoins non satisfaits, notamment l’oncologie, l’immunologie et les maladies rares. »
Une grande nouvelle pour la biotech créée en 1999, que le cofondateur et Directeur Général, André Choulika, nous détaille.
Bpifrance Le Hub : Pour bien comprendre les contours de cet accord, pouvez-vous nous retracer l’histoire de l’aventure Cellectis ?
André Choulika : Cellectis est une société pionnière dans l’édition de gènes. Notre objectif est de développer des approches thérapeutiques à partir de ce concept, qui a été complexe à développer. Quand on parle d’édition de gène, les premières applications qui viennent à l’esprit sont le traitement de la Mucoviscidose ou de la Myopathie de Duchenne où supprimer la mutation causant la maladie fait du sens. Toutefois, le domaine fait encore face à de nombreux défis pour lesquelles nous avons bon espoir qu’ils soient un jour résolus.
Il y a un peu plus de 10 ans, nous avons eu l’idée d’utiliser l’édition de gènes pour créer un nouveau mode de thérapie, que l’on appelle les CAR-T sur étagère ou CAR-T allogéniques, c’est-à-dire l’extraction de cellules T de patients sains, que l’on va « reprogrammer » pour reconnaître et détruire les cellules cancéreuses sans atteindre les cellules saines. Cela nous a permis de développer toute une série de produits CAR-T (parfois en partenariat avec d’autres acteurs) pour traiter des patients atteints de tumeurs liquides (comme les leucémies et les lymphomes) ou solides…
Quels points forts pensez-vous qu’AstraZeneca a vus en Cellectis pour mener à cet investissement ?
AstraZeneca, en voyant les technologies que nous avions développées, s’est intéressé à notre expertise de longue date et à notre stratégie long-terme dans le domaine de la thérapie génique et cellulaire. Leur objectif est de devenir un leader dans le domaine des thérapies cellulaire et géniques et nous leur apportons les pièces de ce puzzle très complexe.
Notre capacité de R&D et d’innovation est très puissante ; nous avons publié un nombre important de brevets et nous possédons une plateforme technologique de haut niveau. Nous avons également internalisé la fabrication de nos produits. C’est donc cette synergie entre capacité de recherche et capacité industrielle qui forme la particularité de Cellectis et contribue à sa réussite.
A l’inverse, en quoi AstraZeneca représente un partenaire de choix pour Cellectis ?
Dans un premier temps, nous avons été séduits par leur connaissance de Cellectis et par leur vision que nous partageons ; ils veulent que la thérapie cellulaire et génique devienne un domaine de la médecine et de l’industrie en plus en plus important.
Il est de plus extrêmement important pour nous d’avoir une bonne alchimie avec nos partenaires, ce qui fut le cas avec AstraZeneca. Celle-ci a été déterminante dans la réalisation de cet accord et le sera dans le bon fonctionnement de notre relation.
J’ai de plus été très impressionné par le bon esprit qu’il y avait chez les équipes d’AstraZeneca, insufflé par Pascal Soriot, Marc Dunoyer et tout le leadership autour d’eux qui est incroyable. C’est pourquoi le feeling est extrêmement positif. Maintenant que la dynamique est enclenchée, le « vrai » travail va commencer et nous avons hâte de nous lancer.
Comment cette collaboration va-t-elle globalement s’articuler ?
Je compte énormément sur les équipes de Cellectis, dans lesquelles j’ai une grande confiance. Nous avons la chance d’avoir un bon track record et des gens de très bonne qualité qui travaillent depuis très longtemps avec nous. Cette relation de confiance à long-terme nous fait nous sentir plus forts et capables d’exécuter ce deal.
Nous sommes convaincus de notre capacité à développer 10 nouveaux produits dans le cadre de cet accord, bien que rien ne soit jamais acquis – cela reste de la science, ce qui comporte une part d’incertitude !
Nous allons inventer ensemble des produits de rupture, ce qui représente de superbes perspectives.
Sans rentrer dans les détails, nous allons travailler sur des domaines thérapeutiques tels que l’oncologie et l’immunologie, ou sur le développement de produits de thérapie génique pour des maladies rares.
Comment cet accord va-t-il rythmer l’année 2024 de Cellectis ?
Depuis sa signature, le partenariat démarre rapidement avec nos équipes internes, car nous avons à cœur de réussir de grandes choses. Nous prévoyons également de recruter de nouveaux collaborateurs pour nous renforcer, mais cela représente des temps de recherche et de formation importants car nous voulons un vrai fit avec les gens qui nous rejoignent.
Sur 2024, l’objectif est de faire coexister la feuille de route de Cellectis avec celle d’AstraZeneca et du partenariat. C’est un planning assez chargé, mais nous nous sommes confiant sur notre capacité à réaliser cet objectif grâce à notre organisation mise en place ces dernières années et l’expérience acquise. Nous travaillons aussi pour anticiper les années suivantes, une fois que tout ce qui doit être implémenté dans le cadre de cet accord le sera.
De plus, nous prévoyons de franchir de nouvelles étapes sur nos propres produits et sur notre expansion, y compris avec d’autres partenaires.
L’accord avec AstraZeneca permet de renforcer la structure capitalistique de Cellectis à court terme et de lui donner de la sérénité pour délivrer les datas d’efficacité clinique à moyen terme.