Alexis Girin : le pari de la deeptech au service du vivant
Quitter une carrière internationale pour se lancer dans une aventure entrepreneuriale unique en son genre : c’est le choix d’Alexis Girin, CEO de HawkCell, une deeptech française spécialisée dans l’imagerie médicale vétérinaire. Un pari motivé par la quête de sens, de liberté et d’impact, qui résume bien la personnalité d’un dirigeant épris de défis.
De l’aéronautique à la santé animale : redonner du sens à la performance
Pendant plus de quinze ans, Alexis Girin a évolué dans des environnements exigeants, entre la France et l’étranger. Ingénieur de formation, il a dirigé des équipes internationales dans l’aéronautique et la connectivité satellite. Lorsque la pandémie de Covid-19 interrompt brutalement le trafic aérien, il prend conscience du décalage entre ses valeurs et sa vie professionnelle alors basée à Singapour. « Je voyais où je serais à 65 ans si je continuais comme ça, et ce n’était pas la vie que je voulais. » Un déclencheur.
À 47 ans, il rentre en France avec une conviction : utiliser la technologie pour avoir un impact positif sur le vivant. Père de quatre enfants, il veut aussi leur transmettre une valeur essentielle : la liberté. « Je veux qu’ils comprennent que la sécurité ne se trouve pas dans la routine, mais dans la capacité à créer. »
C’est dans cet état d’esprit qu’il découvre HawkCell, une jeune entreprise lyonnaise issue de la recherche publique. Fondée par deux physiciens, la société développe des outils d’imagerie avancée pour les animaux, mais manque d’un modèle économique solide. « C’était un magnifique laboratoire, mais il fallait une vision business. »
HawkCell : faire de la technologie une alliée du vivant
Quand Alexis Girin reprend la société en 2021, il reste trois mois de trésorerie. Loin d’être découragé, il voit dans cette situation une opportunité de tout repenser : les équipes, le produit et la stratégie. « En France, nous avons d’excellents ingénieurs, mais parfois une peur du marché. Mon rôle a été de réconcilier la science et le business. »
Sous sa direction, HawkCell passe du hardware à un modèle basé sur l’intelligence artificielle appliquée à l’imagerie vétérinaire. Sa technologie optimise l’analyse des IRM et des scanners, réduit de moitié le temps d’examen et divise par dix la dose de rayons. Une avancée majeure à la fois pour le bien-être animal et pour l’environnement.
Le marché, lui, est en pleine mutation. Encore peu équipé, il accuse un retard de 15 à 20 ans sur la médecine humaine. « Aujourd’hui, on réserve encore l’IRM aux pathologies neurologiques. Nous, nous ouvrons tous les autres champs d’application : orthopédie, cancérologie, imagerie fonctionnelle… »
Pour accélérer, HawkCell s’allie à des géants mondiaux comme Siemens et le leader chinois Time Medical, qui détient 45 % du marché local. « Ces partenariats nous permettent d’aller plus vite et plus loin. Notre IA est compatible avec tous les constructeurs. Elle s’intègre directement aux serveurs d’imagerie sans modifier les logiciels existants. »
Mais l’ambition de l’entreprise dépasse la seule prouesse technologique. Alexis Girin veut aussi répondre à un enjeu humain : le bien-être des vétérinaires. « C’est une des professions les plus exigeantes qui soient. Ils sont à la fois chirurgiens, entrepreneurs et gestionnaires. Nous voulons leur redonner du temps et du confort de travail. »
L’entrepreneuriat comme art de vivre
À ses yeux, l’entrepreneuriat n’est pas une vocation, mais une discipline. « On ne naît pas entrepreneur. Mais il faut une motivation profonde, de la créativité et surtout le courage d’être acteur de ses choix. ». Son motto, qu’il répète à ses enfants comme à ses collaborateurs, résume bien sa philosophie : « Ta plus grande denrée dans la vie, c’est le temps qui passe. » Pour lui, c’est aussi une règle de management : optimiser son énergie comme on gère un capital.
Cette vision s’enracine dans son expérience d’athlète. Habitué des Ironman, Alexis Girin applique à l’entreprise la même logique que dans la compétition : préparer, exécuter, tenir la distance. « L’Ironman, c’est l’école de la résilience. On apprend que chaque minute compte, que rien ne s’improvise. C’est exactement la même chose dans l’entrepreneuriat. »
Cette philosophie irrigue toute la stratégie d’HawkCell : fixer une trajectoire claire, avancer par étapes et garder le cap malgré la complexité. « Une startup ne peut croître sans une culture forte et incarnée. Le CEO et son CODIR doivent être l’extension vivante de la vision. On ne peut pas demander aux équipes de s’engager si la direction ne montre pas l’exemple. »
Chez HawkCell, chaque nouvelle recrue reçoit un document de culture d’entreprise fixant les cinq valeurs cardinales : innovation, ambition, résilience, excellence et « grit », cette détermination à ne jamais lâcher. « Dans une startup, il faut accepter de donner avant de recevoir. L’écosystème français a encore du mal avec cette idée : ici, on veut tout sécuriser. Mais la réussite, c’est d’oser, de tester, de se tromper, puis de recommencer. »
Sous son impulsion, l’entreprise compte à présent une vingtaine de collaborateurs. Une croissance maîtrisée, au service d’un objectif clair : devenir le leader mondial de l’imagerie vétérinaire complexe d’ici cinq ans. HawkCell s’est récemment ouverte au marché du scanner, dix fois plus important que celui de l’IRM animale, tout en poursuivant ses recherches sur la réduction des doses et l’amélioration de la qualité d’image.
« Nous voulons prouver qu’on peut allier performance, rentabilité et impact positif. C’est un équilibre délicat, mais c’est ce qui donne du sens à ce qu’on fait. »
Une sagesse à la mesure du défi
Derrière le dirigeant exigeant et le sportif de haut niveau se cache un esprit en quête de sens. Lorsqu’on lui demande avec qui il aimerait s’entretenir, il cite spontanément Confucius : « Un sage. Parce qu’il m’inspirerait sur la patience, la lucidité et la justesse dans les décisions. »
Une réponse qui en dit long sur sa conception du temps, de la responsabilité et du leadership. Pour Alexis Girin, entreprendre, c’est bien plus que diriger une entreprise : c’est apprendre à composer avec l’incertitude, à choisir ses batailles et à donner du sens à l’effort collectif.
« On peut tout perdre dans une startup : l’argent, le confort, la sérénité. Mais si on garde la curiosité, l’énergie et l’envie de créer, on ne perd jamais l’essentiel. »
Chez HawkCell, cette philosophie se traduit chaque jour : une technologie de pointe, une vision mondiale et une équipe soudée autour d’un idéal simple — utiliser la science pour servir le vivant.
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