Nathan Labat, l’entrepreneur qui démocratise le bio

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Le bio ne doit plus être un luxe. C’est la conviction de Nathan Labat lorsqu’il cofonde La Fourche avec Lucas Lefebvre et Boris Meton en 2018.

N Labat CEO La Fourche Copie

Très vite, la startup s’impose comme un acteur majeur du bio en ligne en France. En 2025, elle franchit un cap décisif : une levée de fonds de 31,5 millions d’euros auprès de Bpifrance, via son fonds Large Venture, du fonds d’impact Astanor et de ses investisseurs historiques.

De consultant chez McKinsey à entrepreneur engagé

Avant de se lancer dans l’entrepreneuriat, Nathan Labat passe six ans chez McKinsey, en France puis aux États-Unis. Il y développe son expertise en grande distribution et en grande consommation.

C’est au cours de son séjour outre-Atlantique qu’il prend pleinement conscience de l’écart en matière de durabilité et d’impact. « La consommation et le gaspillage sont encore plus exacerbés qu’en Europe », constate-t-il.

À son retour en France, en 2016, il décide de passer à l’action. « J’ai voulu mettre mon énergie dans un projet d’impact, en le reliant à ma passion pour le retail. C’est comme ça qu’est venue l’idée de faire rimer consommation avec engagement », confie-t-il.

Avec deux amis de promo HEC, Lucas Lefebvre et Boris Meton, il imagine une entreprise capable de changer durablement les habitudes de consommation. De cette ambition naît La Fourche, pensée pour démocratiser le bio et permettre à la classe moyenne de consommer massivement ces produits.

Une conviction que Nathan Labat résume ainsi : « Chaque achat est un acte de vote. Alors que les modèles de distribution alimentaire sont responsables de plus d’un tiers des émissions de gaz à effet de serre, ces votes comptent pour beaucoup ».

 

L’équipe fondatrice de La Fourche : Boris Meton, Lucas Lefebvre et Nathan Labat

 

La Fourche : un modèle d’adhésion qui transforme la fidélité en pouvoir d’achat

Le principal frein à la consommation responsable est le prix. Pour lever cette barrière, La Fourche construit un modèle économique basé sur l’adhésion. Le principe : échanger du pouvoir d’achat contre de la fidélité. En contrepartie d’une cotisation annuelle, les adhérents accèdent à des produits labellisés bio, en moyenne 22 % moins chers que sur le marché.

Cette mécanique réduit les coûts marketing. « Dans l’e-commerce classique, chaque commande coûte du marketing vers Google ou Meta. Chez nous, le coût d’acquisition est payé une fois, au moment de l’adhésion. Cette économie se répercute sur le prix des produits », détaille Nathan Labat.

Sept ans plus tard, la mission originelle de la startup tient ses promesses. « Sept adhérents sur dix disent consommer plus de bio qu’avant grâce à La Fourche », précise Nathan Labat. Une preuve que l’entreprise contribue à élargir le marché.

L’impact de la startup se mesure aussi sur le plan social. 15 000 foyers en situation de précarité bénéficient de l’adhésion gratuite. « Notre philosophie est de ne laisser personne sur le bord de la route », résume le CEO.

 

 

Bpifrance, partenaire de croissance pour ancrer La Fourche en France et en Europe

En septembre 2025, La Fourche boucle une levée de fonds de 31,5 millions d’euros. Un tour de table que Nathan Labat décrit comme « un attelage équilibré ».

D’un côté, les fonds d’impact Astanor et ses investisseurs historiques, garants des valeurs ESG de la startup. De l’autre, Bpifrance, via son fonds Large Venture, qui apporte une dimension institutionnelle. « C’est rassurant en termes de gouvernance d’avoir un acteur comme Bpifrance, avec ses moyens importants et un support solide », confie le CEO.

« Bpifrance a un apport assez peu égalé par les autres fonds. Ils nous ont déjà aidés concrètement sur le recrutement et l’accompagnement opérationnel, via leur réseau d’experts », explique Nathan Labat.

Cette levée s’articule autour de deux priorités. D’une part, consolider le positionnement de La Fourche en France et doubler sa part de marché dans les cinq prochaines années. La startup veut devenir le leader du bio en ligne et s’imposer comme un acteur de référence du secteur. Elle vise aussi à confirmer la maturité et la solidité du modèle, rentable malgré des marges limitées.

D’autre part, accélérer le développement international de la jeune pousse, notamment dans la région DACH (Allemagne, Autriche, Suisse). L’expansion européenne, amorcée en 2022, a déjà porté ses premiers fruits : le marché allemand a généré 4 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2024, avec une prévision de 7 millions pour 2025. La levée de fonds doit permettre d’accélérer cette dynamique.

 

Les équipes de La Fourche

 

Un leader qui scale en même temps que sa startup

Le marché du bio sort de deux années difficiles marquées par l’inflation. Paradoxalement, La Fourche affiche 76 % de croissance en 2023, l’année la plus noire du secteur. Cette croissance exponentielle impose des transformations profondes, y compris pour le dirigeant. Nathan Labat en est conscient : « Mon rôle est d’évoluer au même rythme que l’entreprise. Quand l’entreprise scale, je dois aussi “scaler” ».

« À mesure que la startup grandit, les problématiques évoluent. Au départ, le management reste très opérationnel, puis des couches de management se créent. Il devient alors indispensable d’instaurer de nouveaux process, de redéfinir les rôles et d’apprendre à déléguer. Cette dernière étape est essentielle pour se renouveler et repenser son rôle de dirigeant », explique le CEO.

 

Une culture d’entreprise au service de l’impact

Dans ses jeunes années de consultant, Nathan Labat est marqué par sa rencontre avec l’ancien PDG de Quiksilver. « J’avais alors une vision très analytique du management. Lui m’a apporté une approche plus humaine », se souvient-il. « Ce dirigeant parvenait à faire tenir l’organisation par les tripes, à créer une cohésion émotionnelle. Ça m’a ouvert à de nouvelles questions : comment créer une organisation ? Comment inssufler une culture ? » 

Chez La Fourche, empathie et rigueur façonnent une culture pensée pour créer l’alchimie collective. Cinq piliers la structurent :

  • La débrouille et la frugalité, car avec des marges basses, chaque euro compte ;
  • La transparence et la collaboration, nourries par le feedback et l’entraide ;
  • L’exécution, moteur de compétitivité ;
  • La performance, tournée vers les résultats ;
  • Un engagement collectif, autour du climat et de l’impact.

Derrière le dirigeant aguerri transparaît l’amateur de randonnées, attaché à la nature qu’il cherche à préserver. Se révèle aussi un expert du retail, guidé par l’envie de repenser nos façons de consommer. Cette fidélité à ses principes trace la feuille de route de La Fourche : consolider sa position en France, s’affirmer comme un acteur de poids en Europe, et démontrer que rentabilité et impact ne sont pas incompatibles, mais indissociables pour réussir la transition écologique.

 

Antoine Sternchuss

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