Marie-Agnès Deharveng : faire du remote un levier de cohésion et de performance
Chez Livestorm, le full remote n’est pas une contrainte, mais un choix structurant. À la tête des équipes People et Legal, Marie-Agnès Deharveng construit un cadre de travail exigeant, mais profondément humain. Son credo : concilier rigueur, flexibilité et bienveillance dans un environnement où la distance n’empêche pas la proximité.
Un parcours guidé par la curiosité
Rien ne prédestinait Marie-Agnès Deharveng à devenir VP People d’une scale-up tech. Diplômée en commerce international et stratégies économiques, elle débute dans une petite société d’imagerie médicale, où elle crée son propre poste en marketing et découvre le plaisir d’apprendre en faisant. Cette approche proactive restera sa marque de fabrique.
Désireuse de comprendre le terrain, elle rejoint ensuite le cabinet Michael Page, où elle apprend à vendre non plus un produit, mais un service. Cinq années de recrutement dans l’industrie de la santé la forment à la rigueur, à la résilience et à la négociation.
Une rencontre la conduit ensuite dans l’univers des start-up : un cofondateur repère ses soft skills et lui confie un poste dans une jeune entreprise. C’est là qu’elle découvre son goût pour les environnements mouvants, où tout reste à construire. Trois ans plus tard, elle choisit Livestorm pour relever un défi à la fois humain et organisationnel : structurer une entreprise 100 % à distance.
« Je me suis dit que c’était une compétence à acquérir, confie-t-elle. Dans le métier du people, tout change avec le remote : la communication, les process, la culture. »
Livestorm : faire du full remote une véritable culture
Chez Livestorm, le télétravail n’est pas une expérimentation post-Covid, mais un pilier de l’organisation. L’entreprise a fermé ses bureaux en 2022 pour adopter un modèle 100 % à distance, tout en préservant la cohésion des équipes.
Chaque salarié dispose d’un budget mensuel pour choisir son environnement de travail et d’un budget fixe pour s’équiper chez soi, et l’équipe se réunit trois fois par an lors de séminaires physiques. Cette flexibilité s’accompagne d’un cadre clair : six mois maximum à l’étranger, quatre heures de décalage horaire au plus. « L’équité, c’est essentiel, » rappelle-t-elle.
Cette discipline n’est pas perçue comme une contrainte, mais comme une condition de liberté. Pour Marie-Agnès Deharveng, le rôle des RH consiste à sécuriser ce modèle sans l’étouffer. Les process deviennent des garde-fous, non des carcans. Et derrière les outils numériques, elle revendique un lien concret avec le réel : « Le remote, c’est aussi un moyen d’être alignée avec son rythme. Beaucoup vivent à la campagne ou près de la mer. Ils travaillent dans le calme, entourés de nature : une autre façon de retrouver de l’équilibre. »

Structurer sans brider : l’équilibre entre rigueur et autonomie
Passer au full remote a nécessité de repenser chaque étape du cycle RH : recrutement, onboarding, formation, communication. « Quand on ferme les bureaux, il faut tout anticiper : comment on livre un ordinateur, comment on garde le lien » explique-t-elle.
Aujourd’hui, la vie interne de Livestorm s’appuie sur des rituels précis : le Focus Friday (où les réunions récurrentes sont à éviter), des all hands hebdomadaires, des tune-in and learn bi-mensuels et des one-to-one mensuels centrés sur le collaborateur. Ces moments structurants sont devenus le ciment d’une culture à distance.
La confiance est au cœur du système. Dans un environnement où le contrôle permanent est impossible, la relation managériale repose sur la responsabilisation et la clarté des attentes. « Le but, c’est une relation adulte à adulte », résume-t-elle.
Une culture fondée sur la bienveillance et la transparence
Chez Livestorm, la culture repose sur trois piliers : flexibilité, responsabilité et care. Chaque nouvel arrivant est accueilli avec attention, les réussites sont célébrées collectivement et les échanges entre pairs encouragés. La bienveillance n’est pas un mot creux, mais une pratique quotidienne.
Pour Marie-Agnès Deharveng, cette bienveillance doit s’accompagner d’exigence : « On peut être exigeant tout en restant respectueux. » La transparence et le feedback structurent la progression individuelle et évitent les non-dits.
À son arrivée, elle a voulu que les bonnes nouvelles ne soient plus seulement l’affaire du management, mais aussi du service People : « Annoncer les réussites fait partie de notre rôle, au même titre que gérer les moments difficiles. »
L’innovation RH au service de l’efficacité
Dans une entreprise entièrement à distance, la technologie devient un levier stratégique. Livestorm avait déjà amorcé l’automatisation d’une grande partie des tâches administratives (onboarding, suivi RH, reporting) ; Marie-Agnès Deharveng contribue à en renforcer la cohérence et à recentrer l’équipe People sur l’accompagnement et la formation.
Prochaine étape : mieux exploiter la donnée RH. Marie-Agnès souhaite s’appuyer sur des outils capables de produire des analyses en temps réel pour piloter les évolutions de carrière, anticiper les besoins et mesurer l’impact des politiques internes. « La data est le prochain levier de performance RH » estime-t-elle.

L’humain au cœur de la technologie
Si elle mise sur l’automatisation, Marie-Agnès Deharveng reste convaincue que la technologie ne doit jamais effacer l’humain. Sur le recrutement, notamment, elle insiste sur la nécessité d’un discernement humain. « L’IA ne peut pas tout faire, surtout pour évaluer le fit culturel et s’assurer que le projet de carrière des candidats soit en adéquation avec ce que Livestorm propose. »
Elle en parle avec conviction, consciente que sa propre carrière en est la preuve : « Je n’aurais jamais été recrutée par une IA. Ce sont mes soft skills qui ont fait la différence. »
Cette vision traduit une conviction profonde : la technologie n’a de valeur que si elle renforce la qualité du lien entre les personnes. C’est aussi pour cela qu’elle défend une approche « slow » du management — prendre le temps d’écouter, de comprendre, d’ajuster. Un rythme à l’image de celui qu’elle cultive dans sa vie personnelle, au contact de la nature.
Les défis de demain : IA, data et culture partagée
Pour les années à venir, ses priorités sont claires : renforcer la culture partagée dans un environnement éclaté et mieux exploiter les données RH pour piloter la croissance. Son mantra guide son action : si on ajoute, on enlève. Simplifier pour gagner en efficacité, sans perdre l’humain.
Face à l’accélération technologique, elle plaide pour une approche mesurée et responsable. L’enjeu : maintenir la cohésion, la transparence et l’équité dans un monde du travail toujours plus flexible.
« Être VP People, c’est faire preuve de résilience, garder la tête froide et rester empathique », conclut-elle. Une définition lucide d’un métier en pleine mutation, à l’image de la culture qu’elle bâtit chez Livestorm : exigeante, bienveillante et profondément humaine.
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