CEO : Comment accélérer l’adoption de l’IA dans votre entreprise ?
10 juin 2025
De 08h30 à 11h30

Présentation de l'événement
Une table ronde sous le signe de l’action concrète. Le 10 juin 2025, à l’initiative de Bpifrance Le Hub, dirigeants et experts se sont réunis pour partager leurs expériences autour d’un sujet désormais incontournable : l’adoption de l’intelligence artificielle (IA) dans les entreprises.
Loin des discours abstraits ou des prédictions futuristes, cette rencontre a permis de plonger dans les réalités opérationnelles des organisations en pleine transformation. Comment sensibiliser les équipes ? Où placer ses priorités ? Et surtout, comment éviter que l’IA ne devienne un simple gadget ou, pire, un facteur de désorganisation ?
Autour de la table, des profils complémentaires :
– Ludovic Rateau, CEO de Ringover, une plateforme de communication propulsée par l’IA pour améliorer la productivité des équipes commerciales et support
– Elsa Darquier, COO de Brut, le média digital 100% vidéo, pionnier dans l’usage de l’IA pour la création de contenu et l’optimisation éditoriale.
– Thomas Solignac, cofondateur de Kayro.ai et Golem.ai, deux startups spécialisées dans les technologies d’IA appliquées aux métiers et à la documentation
– Damien Bon, CEO de Skill & You, une plateforme de formation distancielle qui utilise l’IA pour améliorer la qualité de son offre pédagogique
– Baptiste Dedieu, responsable innovation chez KPMG, cabinet de conseil et d’audit, impliqué dans les enjeux de transformation digitale et de gouvernance des données
Le catch-up a été animé par Pierre Jarrijon, responsable accélération IA chez Bpifrance. À la fin de la conférence, un message clair en ressort : adopter l’IA ne relève pas uniquement d’un choix technologique, mais bien d’un enjeu de gouvernance, d’acculturation, et de modèle économique.
1. Pourquoi investir dans l’IA ? Ce que ça change vraiment
Investir dans l’IA n’est plus un luxe, ni même un pari : c’est une exigence stratégique. Plusieurs dirigeants l’ont rappelé : la question n’est pas tant « pourquoi y aller ? » que « que risque-t-on à ne pas y aller ? » Car derrière le discours technophile, les cas d’usage réels montrent des transformations profondes.
Chez Ringover, l’IA générative permet de traiter la masse croissante de conversations téléphoniques sans y sacrifier l’écoute humaine. Résultats ? Une réduction de 70 % du temps passé à re-consulter les appels et un meilleur suivi client. Chez Skills & You, la production augmentée des contenus pédagogiques ne se limite pas à un gain de temps : elle redéfinit le rôle de l’expert, qui passe de producteur à validateur stratégique.
Chez Brut, l’IA agit comme révélateur identitaire. « On s’est rendu compte qu’on n’était plus un média au sens classique, mais une entreprise de narration, d’émotion, de conversation. », souligne Elsa Darquier, COO. L’IA, ici, force une entreprise à re-questionner sa proposition de valeur : qu’apporte-t-on vraiment à nos audiences ?
Ces exemples soulignent que l’IA n’est pas un outil de plus, mais un changement de paradigme : elle oblige à revoir la chaîne de valeur, du produit à la relation client.
2. Structurer, gouverner, piloter : les conditions d’une adoption réussie
À écouter les intervenants, une leçon revient : l’adoption de l’IA ne doit pas être abordée comme un projet IT classique. Thomas Solignac (Kayro.ai et Golem.ai) insiste : « On traite souvent l’IA comme un sujet technique. C’est une erreur. C’est un sujet de transformation. »
Cela implique une gouvernance forte et multidisciplinaire. Chez Brut, le sujet est désormais traité en comité de direction chaque semaine. Cette récurrence permet d’ajuster les décisions, de suivre les retours terrain et de lisser les effets de la fameuse « courbe de désillusion » que connaissent toutes les équipes confrontées à une hype technologique.
KPMG, de son côté, a tiré des leçons d’une première phase trop ambitieuse : vouloir tout faire, trop vite. « En voulant initialement couvrir l’ensemble de nos cas d’usage avec l’intelligence artificielle, l’adoption est restée limitée. Forts d’une meilleure compréhension des cas d’application efficaces, nous avons établi une cartographie claire des usages IA pertinents pour le métier, reflétant la maturité croissante de l’intégration de l’IA dans les fonctions audit et finance. », appuie Baptiste Dedieu, directeur d’innovation chez KPMG.
Autrement dit, la vitesse sans structure est un leurre. Ce n’est pas l’outil qui transforme l’entreprise, mais l’organisation qui s’adapte à l’outil.
3. Culture, compétences, légitimité : accompagner le facteur humain
Un des enseignements majeurs du panel : les résistances à l’adoption de l’IA sont rarement techniques, mais presque toujours humaines. Peur de l’inconnu, sentiment d’illégitimité, crainte de l’obsolescence : autant de freins qui empêchent l’appropriation.
Elsa Darquier l’exprime avec lucidité : « Nous ne sommes pas des experts. Mais une fois qu’on a accepté cela, qu’on a ciblé quelques priorités et mis les bonnes personnes au bon endroit, tout s’est fluidifié. »
Créer des rôles de “champions”, mettre en place des ateliers métiers-techniques, encourager les usages quotidiens même imparfaits : ce sont ces petits leviers qui créent une dynamique d’ensemble. L’IA ne doit pas être l’affaire d’une élite tech, mais une compétence distribuée. Et cela suppose une volonté managériale forte pour démocratiser l’expérimentation.
« « L’adoption de l’IA est avant tout un enjeu culturel. Pour qu’elle soit réellement réussie, il faut la rendre accessible dans un environnement sécurisé, l’incarner dans les pratiques concrètes, et surtout, la désacraliser. » » — Baptiste Dedieu, KPMG
4. Les erreurs classiques à éviter
Tout au long de la table ronde, plusieurs pièges ont été identifiés :
- Déploiement sans stratégie : multiplier les expérimentations sans cadre mène à l’essoufflement.
- Effets d’annonce vs réalité terrain : attention à la hype. Les équipes se fatiguent vite des promesses non tenues.
- Shadow IT : l’utilisation d’outils IA non maîtrisés par les collaborateurs peut mettre en péril la confidentialité des données.
- Approche gadget : une IA mal intégrée devient rapidement un jouet coûteux. L’outil doit répondre à un besoin métier précis.
- Le manque de données fiables empêchant de garantir la qualité des réponses générées.
Ces erreurs ne sont pas anodines. Elles peuvent freiner durablement la crédibilité de l’IA dans l’entreprise. C’est pourquoi plusieurs intervenants recommandent une approche incrémentale, rigoureuse, structurée.
5. L’IA transforme aussi les modèles économiques
L’adoption de l’IA ne se limite pas à un changement opérationnel. Elle modifie la structure même des business models. C’est ce que souligne Thomas Solignac : « On passe d’une logique de vente à la journée-homme à des services packagés, automatisés, parfois vendus par abonnement. »
Ce glissement a des conséquences fortes : sur la facturation, sur les métiers, sur la proposition de valeur. Ce n’est plus le temps passé qui est monétisé, mais l’accès à un service enrichi par l’IA. C’est aussi ce qui pousse certaines entreprises à créer des unités autonomes, voire des spin-offs, pour tester de nouveaux modèles économiques sans friction avec le cœur historique.
Damien Bon (CEO chez Skills & You) note également un besoin de maintenir l’esprit critique : « L’IA est puissante, mais elle peut se tromper. Il faut rester en mesure de vérifier, corriger, arbitrer. » Autrement dit, l’automatisation ne doit jamais sacrifier l’expertise. « Le capital humain reste la barrière à l’entrée la plus solide. C’est ce qu’il faut préserver, et renforcer. »
6. Messages finaux : construire, tester, itérer
À la fin de la discussion, chaque intervenant a partagé un conseil. Tous se rejoignent sur un point : il faut sortir de l’immobilisme, accepter l’imperfection, et apprendre en marchant.
- Ludovic Rateau souligne l’importance de garder son esprit critique. « C’est un outil fantastique, mais il peut se tromper. Comme Excel, l’IA reste un outil et il faut apprendre à bien s’en servir. »
- Thomas Solignac insiste sur la pédagogie : « L’IA semble technique, mais elle est accessible. Il faut juste oser descendre dans l’usage. »
- Elsa Darquier évoque l’émotion : « L’IA peut faire revivre une histoire, créer de l’impact. C’est un outil narratif puissant. »
- Damien Bon appelle à l’équilibre : « L’innovation demande autant de rationalité que de créativité. Il faut activer les deux pôles de notre cerveau dans l’utilisation de l’IA. »
En résumé, les clés de succès pour l’adoption de l’IA
- Structurez vos données avant toute chose : une IA mal nourrie délivre de mauvais résultats.
- Appuyez-vous sur des relais internes : identifiez les curieux, les profils hybrides, les faiseurs.
- Traitez l’IA comme un projet de transformation : gouvernance, conduite du changement, vision long terme.
- N’ayez pas peur de vous tromper : ce sont les erreurs qui font progresser.
L’adoption de l’IA, c’est moins un bond technologique qu’un chemin culturel. Ce chemin se trace pas à pas, avec rigueur, modestie, et ambition. Comme le rappelle Pierre Jarrijon de Bpifrance, « On n’investit pas dans l’IA pour suivre la tendance, mais parce qu’elle rebat les règles du jeu économique. Ce qui compte, ce n’est pas l’outil, c’est ce que nous faisons avec. »
Les intervenants
-
Ringover
Co-Founder & CEO
-
Brut
COO
-
Skills & You
CEO
-
Kayro.AI & Golem.AI
Co-founder
-
Bpifrance
Responsable de l'accélération IA
-
KPMG
Director Audit - Digital Audit & Innovation
Programme
08h45 – Accueil & networking
09h00 – Table ronde : Débloquer l’adoption de l’IA au sein de votre entreprise
– Ludovic Rateau, CEO de Ringover
– Elsa Darquier, COO de BRUT
– Thomas Solignac, Expert en IA, cofondateur de Kayro.ai et Golem.ai
– Damien Bon, CEO Skills You
Animé par Pierre Jarrijon, Responsable Accélération IA – Bpifrance
10h – Conclusion par Baptiste, KPMG
10h10 – Q&A et échanges avec les participants
10h30 – Networking
Informations pratiques
Horaire et lieu
De 08h30 à 11h30
Bpifrance - Le Hub - 4ème étage 6-8 boulevard Haussmann
75009 Paris
