« La transition environnementale et numérique est à la fois notre grand défi et un enjeu de mobilisation dans le cadre de la réindustrialisation »

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Pour répondre à leurs grands défis, il appartient aux industriels de s’appuyer sur l’Innovation pour mieux s’adapter. Les collaborations startups représentent un précieux vivier de solutions.

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Face à la multiplicité des enjeux et à la multitude de startups émergentes, il n’est pas toujours simple de s’y retrouver, y compris sur les sujets aussi cruciaux que la décarbonation.

C’est pourquoi, le 5 Octobre, à l’occasion de BIG 2023, le plus grand rassemblement business d’Europe organisé par Bpifrance, Le Hub dévoilera la deuxième édition de son Mapping Décarbonation, au cours de sa table-ronde intitulée « Transition environnementale et numérique : transformez l’industrie en collaborant avec les startups » durant laquelle nous partagerons des clés de lecture et d’action pour tirer le maximum de valeur de ces synergies.

Vincent Moulin Wright – Directeur général – France Industrie :

« La transition environnementale et numérique est à la fois notre grand défi et un enjeu de mobilisation dans le cadre de la réindustrialisation. Les solutions technologiques portées par les filières industrielles constituent une réponse forte à cet enjeu de société et économique. Nous savons pouvoir compter sur les startups pour enrichir l’offre de solutions software et hardware : ce mapping fait partie des initiatives de France Industrie pour les mettre en lumière. »

 

Quels sont les principaux enjeux de l’industrie française à horizon 2030 ?

Jean-Philippe Thierry (Directeur Innovation et Industrie du Futur · France Industrie) : Le principal enjeu de l’industrie française à l’horizon 2030 est de réussir sa transition numérique et environnementale. A cet enjeu s’ajoute celui de l’innovation, laquelle apportera les solutions technologiques qui permettront à nos sociétés de vivre mieux et plus sobrement. C’est là que se trouvent les leviers de compétitivité et c’est sur ces conditions que repose la réindustrialisation de notre pays.

Plus d’industrie en France = plus de décarbonation : à travers les solutions innovantes qu’elle apporte mais aussi en évitant de produire à l’autre bout du monde ce que nous pouvons produire plus efficacement en France, et cela sans les émissions carbones générées par le transport de marchandises.

Jean-Marie Danjou (Directeur Général Alliance Industrie du Futur, Délégué Permanent Filière Solutions Industrie du Futur) : Les enjeux sont nombreux et cruciaux puisqu’il s’agit de ceux qui nous feront entrer définitivement dans la 4ème révolution industrielle, celle de la révolution de la décarbonation, de l’électromobilité et du mix énergétique. Ces révolutions sont en marche. Il n’y aura pas d’industrie demain si elle n’est pas décarbonée. Autrement dit, la décarbonation est un impératif pour l’industrie

Quels sont les moyens à disposition des industriels pour accélérer leur décarbonation ?

Jean-Philippe Thierry : La décarbonation est protéiforme. Elle passe par une (r)évolution de usages (sobriété, recyclage, circularité…) et l’amélioration de l’existant (verdissement de nos moyens de production et augmentation de leur performance, efficacité énergétique des bâtiments…) ; elle passe aussi par le recours à une énergie verte (nucléaire, éolien, photovoltaïque, hydrogène) ; elle passe enfin par le recours aux solutions technologiques innovantes qui viendront réduire leur empreinte environnementale (nouveaux matériaux, matières premières « vertes », nouvelle génération de batteries, nouveaux carburants…).

Jean-Marie Danjou : L’Industrie est au cœur des enjeux du changement climatique. C’est elle qui peut relever ce défi, grâce à la digitalisation, des solutions plus optimisées en termes de consommation énergétique. De plus, la décarbonation passe par des innovations de rupture. Or nous avons les solutions aujourd’hui pour décarboner l’industrie et :

–       digitaliser nos process industriels

–       remplacer le carbone par un mix énergétique

–       emprisonner le carbone émis (captation, stockage et valorisation de CO2)

Quels sont les freins aux collaborations innovantes entre industriels et startups ?

Jean-Philippe Thierry : Les freins se situent principalement au niveau de la culture et de la notion temps.

Il y a une vraie volonté chez ces deux acteurs de collaborer. Les startups et les grandes entreprises appartiennent en revanche à des mondes différents, qui collaborent mais se connaissent peu. Leurs attentes, leurs échelles, leurs cultures sont différentes. De ces différences naissent parfois des incompréhensions qui peuvent freiner voire empêcher la réussite de certaines collaborations.

La notion du temps est liée à l’échelle de l’entreprise. Une grande entreprise industrielle peut avoir des procédures internes (processus de validation, aspects juridiques, politique interne…) qui paraissent trop longues pour une start-up qui a besoin d’aller vite. Le modèle de croissance rapide propre aux start-up est souvent confronté au modèle plus prudentiel d’une grande entreprise. Cette différence peut être un frein réel aux collaborations.

Damien Marc, Président de JPB Système et co-pilote du groupe « Startup » du Comité Stratégique de Filière (CSF) Solutions Industrie du Futur » (S-I-F), porté par l’Alliance Industrie du Futur (AIF) : 1. Différences culturelles : Les startups ont souvent une culture d’entreprise très différente de celle des grands industriels. Elles sont généralement plus flexibles, prennent des risques plus importants et ont une approche plus agile. Cette différence peut entraîner des malentendus ou des frictions. C’est le point principal et l’enjeux de notre mission est de faciliter ces rencontres croisées entre la Fab et la Tech.

2. Rythmes différents : Les startups évoluent rapidement, tandis que les grands industriels ont des processus plus lents en raison de leur taille et de leur structure. C’est un choc entre innovation et transformation ou la temporalité entre ces deux acteurs ne sont pas en adéquation.

3. Questions de propriété intellectuelle : Les questions liées à la propriété des innovations, des brevets et des autres actifs peuvent être un point de friction. Les deux parties peuvent avoir des préoccupations quant à la protection et à l’exploitation de leurs innovations. Il est aussi souvent questions de datas appartenant aux industriels qui seront hébergées sur le Cloud, c’est un point d’attention et de blocage potentiel.

4. Ressources financières : Les startups peuvent avoir des ressources limitées et dépendre fortement des investissements pour leur survie. Les industriels, quant à eux, peuvent être réticents à investir sans garanties suffisantes. Les startups proposent souvent des offres en Saas, encore mal comprises et ne correspondant pas à la norme chez les industriels.

5. Manque de confiance : Les industriels peuvent douter de la capacité d’une startup à livrer un produit ou un service à grande échelle ou à respecter les normes de qualité.

6. Différences de vision : Les objectifs à court terme d’une startup (comme obtenir le prochain tour de financement) peuvent différer des objectifs à long terme d’un industriel.

7. Risques associés à l’innovation : Les industriels peuvent être réticents à adopter de nouvelles technologies ou méthodes de travail en raison des risques associés et de la résistance au changement. Les industriels peuvent ne pas être familiarisés avec les dernières innovations ou technologies, ce qui peut les rendre réticents à collaborer.

8. Questions contractuelles : La négociation de contrats peut être compliquée, en particulier en ce qui concerne les termes, les responsabilités, les normes IT des grands groupes sont souvent des obstacles également.

Quelles sont les solutions pour y remédier ?

Jean-Philippe Thierry : Les outils et les cadres se multiplient pour améliorer ces collaborations et le partage de bonnes pratiques.

Sur le premier point, l’écosystème dans son ensemble travaille à construire des outils qui permettent de faciliter et d’accélérer les relations entre grandes entreprises et start-up. Il y a de nombreuses initiatives qui proviennent de Bpifrance, de la French Tech (ex : French Tech Corporate Community, French Tech Finance Partners…), de France Industrie et bien d’autres organisations pour identifier et élaborer les solutions concrètes ; lesquelles prennent plusieurs formes : de l’adoption de guidelines à la mise à disposition de salariés en passant par des rencontres business ou encore des engagements à augmenter les achats de l’entreprise aux start-up… Le mapping fait partie de ces outils qui améliorent la connaissance des solutions technologiques existantes. Il a le mérite de mettre en lumière les jeunes entreprises qui peuvent apporter rapidement des réponses aux besoins des grandes entreprises ; il répond enfin à un double besoin : de la visibilité pour les start-up et d’apporter de la connaissance aux entreprises en recherche d’offreurs de solutions.

Sur le second point, les grandes entreprises échangent entre elles sur les pratiques vertueuses qu’elles mettent en place : sur le scouting, l’investissement, les facilités offertes pour entrer dans leur catalogue fournisseur, des conditions de contractualisations et de paiement plus agiles… Elles travaillent depuis quelques années à améliorer leurs rapports avec les start-up. France Industrie est par exemple un lieu où nous échangeons sur ces différents sujets et travaillons à référencer les pratiques qui fonctionnent le mieux en vue de leur adoption par le plus grand nombre d’entreprises (cf. Manifeste des grande entreprises pour les start-up).

Damien Marc : La clé du succès réside dans la volonté des deux parties de se trouver, de vouloir travailler ensemble, de comprendre les perspectives de l’autre et de trouver des solutions qui apportent de la valeur.

1. Se trouver mutuellement : C’est souvent la première difficulté. C’est pourquoi la création d’un mapping ou d’un site web conçu pour trouver des startups en fonction des besoins des industriels peut constituer un premier outil d’intérêt.

2. Mise en place de programmes d’incubation ou d’accélération : Ces programmes peuvent aider les startups à comprendre la culture et les processus des industriels, tout en offrant aux industriels un aperçu des innovations des startups. Créer un Airbnb des Startup dans l’industrie pour offrir à ces premières un terrain de jeux concret et un showroom à taille réelle.

3. Accords clairs sur la propriété intellectuelle : Établir dès le départ des accords clairs sur la propriété, l’utilisation et la monétisation des innovations et des datas peut éviter de nombreux conflits.

4. Pilotage de projets conjoints : Avant de s’engager dans des collaborations à grande échelle, les deux parties peuvent commencer par des projets pilotes (POC) pour évaluer la faisabilité et la valeur ajoutée de la collaboration et cadrer la suite du partenariat.

5. Établir des KPIs et des objectifs communs : Définir des indicateurs de performance clairs et des objectifs communs peut aider à aligner les visions et à mesurer le succès de la collaboration. Chez KEYPROD, nous incluons cela dans notre contrat de « POC cadré » pour chaque industriel.

6. Réseautage et événements conjoints : Organiser des événements de networking ou des ateliers conjoints peut renforcer les relations et la compréhension mutuelle.

Si vous aviez une startup « pépite » agissant pour la décarbonation de l’industrie, laquelle choisiriez-vous ?

Jean-Philippe Thierry : Coup de cœur pour Neolithe que France Industrie suit depuis un moment et qui est à la fois une entreprise industrielle et un offreur de solution de décarbonation pour l’industrie !

Alexandre Lacour, Président de Gestion & Prospective, et co-pilote du groupe « Startup » du Comité Stratégique de Filière (CSF) Solutions Industrie du Futur (S-I-F), porté par l’Alliance Industrie du Futur (AIF) : La décarbonation est un thème transverse qui s’adresse à toutes les entreprises et cela peu importe leurs activités. C’est à chacune d’établir sa feuille de route « décarbonation ». L’enjeu est donc de pouvoir référencer dynamiquement les solutions innovantes pour aider l’industrie à se transformer. Il n’y a donc pas « la pépite » mais des pépites.

J’assiste à la table ronde « Transition environnementale et numérique : transformez l’industrie en collaborant avec les startups » à BIG 2023

Antoine Sternchuss

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